Né au Tchad, mais ayant grandi au Sénégal, c’est à l’âge de 18 ans qu’il débarque à Marseille. Avec dans un premier temps l’intention de devenir militaire comme son père, qui s’était battu pour la France lors de la Seconde Guerre mondiale, il se retrouve finalement à la rue et doit faire preuve de débrouille pour survivre.
C’est d’ailleurs dans un foyer pour jeunes en difficulté qu’il se fait remarquer pour la première fois, ayant à plusieurs reprises tenu tête à des caïds qui y vivaient à l’époque. Les responsables du foyer décident alors de l’embaucher en tant que surveillant, et c’est ainsi que Pape Diouf commence à gagner sa vie. Bénéficiant d’une chambre gratuite, il en profite pour reprendre ses études, et se lancer dans le journalisme en tant que pigiste pour le journal Le Sport, qui malheureusement dépose le bilan moins d’un an après.
Ne baissant jamais les bras, il décide de tenter sa chance comme agent de joueur de football. Pape se rend compte à l’époque que les joueurs africains sont, à talent égal, souvent moins bien payés que les autres joueurs, même au plus haut niveau ; il a alors l’ambition de corriger cette injustice, tout en gagnant mieux sa vie. C’est en organisant des jubilés pour anciens joueurs qu’il commence à nouer des contacts importants tel que Basile Boli, qui sera son premier poulain. Plus tard, il devient même une référence auprès des joueurs africains souhaitant évoluer en France, en accompagnant Didier Drogba par exemple.
Le lionceau est devenu grand, mais l’appétit venant en mangeant, Pape Diouf est prêt à tout lâcher pour réaliser son rêve : devenir le patron de l’OM ! Pour saisir cette opportunité que lui offre Robert Louis Dreyfus, pris d’affection et d’admiration pour lui, il n’hésitera pas à faire des sacrifices financiers colossaux en abandonnant son activité d’agent de joueur. Il devient alors le premier agent à obtenir un haut poste de direction dans un club de football professionnel. Le lion est désormais président d’un grand club, au passage le premier noir africain à le devenir en Europe, et il est attendu au tournant.
Les résultats feront taire les critiques et le mépris de beaucoup de pseudo-spécialistes, lui reprochant son manque d’expertise et d’expérience. Sa nomination provoquant même sarcasmes et dérisions, des paris avaient été pris par les plus moqueurs, quant à l’espérance de vie de son mandat. Pourtant, encore une fois parti d’une situation initiale précaire et faible, il parcourut de nouveau le chemin de la réussite en faisant craindre et respecter l’OM en France comme auparavant. Il installera aussi le club comme l’un des plus importants dans le monde du football professionnel européen, avec des participations régulières en Ligue des champions. S’il n’est plus aux manettes de l’OM depuis peu de temps au moment du titre de champion en 2010, un grand nombre de supporters lui en accorde cependant la gloire et nombre de mérites.
Pape Diouf, qui selon ses propres aveux, a toujours été plus attiré par le succès que par l’argent, est devenu un symbole de réussite. Et si son décès pince autant les coeurs, c’est parce qu’il fait justement partie des hommes dont le mérite dépasse même cette réussite. Pape Diouf laisse derrière lui l’image d’un homme qui restait endurant face aux contraintes et aux préjugés. Aujourd’hui encore, beaucoup sont influencés par son parcours, et cette influence continuera de se ressentir dans nos actes.
Nombreux sont les témoignages de personnalités du football ou du journalisme pour qui il aura eu une influence directe, mais on ne parle peut-être pas assez de l’influence indirecte profonde qu’il continuera d’avoir sur les choix et le comportement d’autres hommes, qui grâce à son exemple, tendront la main à des personnes se trouvant dans une situation apparentée à la sienne lors de ses débuts. C’est ce qu’on appelle avoir changé les choses, et finalement, comment peut-on mieux réussir sa vie, qu’en ayant changé les choses ?