Foot Marseille : Vous êtes supporter de l’OM. Comment jugez-vous le niveau de l’équipe cette saison ?
JE : Il est assez incroyable avec un remaniement complet et des joueurs qui se connaissent très peu. Une chose qui me gêne, c’est quand on ne laisse pas travailler les coachs. Tudor arrive dans les conditions que l’on connaît et heureusement, Pablo Longoria l’a soutenu et a attendu qu’il mette en place son travail. Actuellement, il est en train de montrer sa patte et il a les hommes qu’il faut pour le faire. C’est un football qu’on avait déjà un peu l’année dernière, mais qu’on n’arrivait pas à maintenir parce qu’on n’attaquait pas. Aujourd’hui, le schéma est parfait, il y a un Sanchez qui est monstrueux et un banc. C’est une saison incroyable et je les crois capables de remporter le championnat de France et la Coupe de France. Ils sont capables de tout, mais la gestion des hommes va être très importante. Cette victoire contre le PSG va faire un bien fou mentalement.
FM : Avec votre oeil d’entraîneur, d’éducateur, quel regard portez-vous sur la philosophie d’Igor Tudor ?
JE : La première chose c’est que les mentalités ont changé et courir est devenu compliqué pour certains. Quand tu es une star, tu as envie d’en faire un peu moins. Je me répète, mais je suis admiratif du président qui lui a laissé le temps, qui a surement trouvé les mots auprès des joueurs. C’est le football moderne. Fût un temps, on avait un football plus direct et désormais c’est un football de possession, mais peu d’équipes arrivent à faire ce que fait l’OM. J’ai discuté avec mon pote Éric Allibert, qui est coach des gardiens à Toulouse, après le déplacement à Marseille il m’a dit : ‘Johnny, c’est incroyable. On a travaillé toute la semaine, on a épluché leur jeu, on a fait de la vidéo, on était au point et on savait exactement ce qu’il allait faire. L’OM, c’est impossible à jouer, ils sont usants. Ça dézone, tu ne sais pas qui joue où, ce ne sont que des passes courtes. En fait, tu ne fais que courir et quand il y a une petite faille, un mètre de différence, tu es corrigé de suite.’ Tout ça est un énorme travail.
FM : Dans ce système, le poste de latéral notamment, que vous avez occupé durant votre carrière, a beaucoup évolué.
JE : On parle même plus de latéral, ce sont des pistons. Il faut avoir du coffre, si tu n’es pas prêt physiquement tu ne t’en sors pas. Il faut une qualité de centre, attaquer quand tu as le ballon, défendre quand tu ne l’as pas, tu resserres dans l’axe à la perte, tu écartes en phase offensive, c’est du un contre un. Ce n’est plus pareil, en effet. Pour revenir sur le match face au PSG en Coupe, j’avais justement un peu peur sur les un contre un, mais quand je vois la prestation de Gigot sur Messi notamment, je dis chapeau. On dit souvent que c’est facile de défendre contre eux parce qu’ils courent rarement, mais quand ils ont le ballon, je peux vous dire qu’ils courent.
FM : Pablo Longoria abat un travail colossal à la tête de l’OM. Vous qui avez connu Pape Diouf, que faut-il pour être un grand président ?
JE : Un carnet d’adresses déjà. Quand il y a besoin d’un joueur, il faut savoir qui appeler de suite. Il faut aussi faire une gestion de tous les instants, ne rien laisser passer et surtout travailler sereinement en protégeant le coach. Pour avoir eu le plaisir de le rencontrer dans le cadre d’un partenariat, on sent de suite que Pablo Longoria est quelqu’un de très attaché au football, très attaché à l’OM et qui veut le bien du club. Il n’est pas là pour se mettre en avant, il est là pour faire grandir l’Olympique de Marseille. Pape Diouf faisait le même travail, mais on lui a reproché d’être manager et de prendre des joueurs à lui. Il a fait malgré tout un travail exceptionnel et pour l’avoir côtoyé, c’était une personne magnifique.
FM : Revenons justement sur ce partenariat. Avec Beaucaire, vous faites partie de ce projet OM Next Gen lancé en 2017. Qu’est-ce que cela implique concrètement pour les deux clubs ?
JE : L’OM a commencé à mettre ça en place avec les clubs qui se trouvaient aux alentours. C’est quelque chose d’important parce que les clubs aux alentours ont quand même la fibre marseillaise. Ils se sont étendus à d’autres départements avec nous en premier lieu dans le Gard, puis avec Fred Meyrieu à Toulon. On bosse bien, on a de bons petits. Là où je tire mon chapeau à l’OM, c’est que cela bénéficie plus aux clubs amateurs qu’à l’OM actuellement. Personnellement, nous avons fait signer deux joueurs à Marseille, mais globalement ce partenariat profite davantage aux clubs amateurs. Lorsque l’on a un bon joueur, on le signale, mais on travaille aussi avec Montpellier. On ne peut pas signer une exclusivité. Si j’ai un petit qui est demandé à droite, à gauche, je préviens l’OM pour qu’ils le voient aussi. On a des avantages que les autres clubs ne nous donnent pas : des places au stade, permettre aux gamins de venir à l’OM Campus, faire des matchs amicaux, être invité à leurs tournois prestigieux. Ils viennent aussi une ou deux fois à Beaucaire, ce n’est pas rien. C’est important pour nous.
FM : C’est un processus qui est long, mais on constate malgré tout peu de résultats depuis 6 ans. Comment expliquez-vous que certaines jeunes privilégient par exemple Montpellier ou Nice ?
JE : Alors oui, la formation est décriée parce qu’il n’y a pas de joueurs formés à Marseille aujourd’hui. La raison je ne la connais pas. Il y aussi un remaniement chaque année, la raison, je ne la connais pas non plus. Ce que je peux vous dire pour avoir vu ces équipes sur place, c’est que le travail qu’ils réalisent là-bas, c’est monstrueux. Après, peut-être que de ne voir qu’aucun joueur n’est en équipe première n’incite pas à choisir Marseille, je ne sais pas. J’ai eu le cas avec Laouni Benson, qui est désormais capitaine avec les U16 de l’OM qui était avec moi depuis l’âge de 9 ans et qui a choisi l’OM plutôt que Montpellier ou Monaco. Il n’y a jamais de décisions meilleures qu’une autre, ou du moins il n’y a que l’avenir qui le dit. C’est aussi difficile dans un club comme dans l’autre. À la fin, ce sont les parents et le joueur qui décident dans tous les cas. Aux dirigeants de l’OM d’avoir un bon discours auprès des petits et des parents.
FM : Comment voyez-vous la fin de saison de l’OM ? On connaît les impératifs économiques du club, mais est-ce qu’un titre en Coupe de France ne serait-il pas encore plus beau qu’une qualification en Ligue des Champions ?
JE : Pas forcément. Les deux m’iraient bien pour être honnête. Je me répète, mais avec le banc qu’ils ont actuellement, ils sont capables de faire les deux. Ce sera quelque chose de difficile évidemment parce que, pour l’avoir vécu, tu as beau avoir la moitié du stade derrière toi sur certains déplacements, l’adversaire en face il est à 150%. Il n’y a aucun match facile pour l’Olympique de Marseille, il faut toujours être à fond. Un titre en Coupe serait très beau et je serai le premier à me rendre au stade de France, mais la Ligue des Champions te permet d’affronter des clubs prestigieux dans ton stade, te rapporte des millions d’euros qui ne sont pas négligeables et surtout de garder des joueurs, je pense notamment à Alexis Sanchez.
La première partie de l’interview est à retrouver ici.
La seconde partie de l’interview est à retrouver ici.