Le sprint lancé, il ne reste plus que deux équipes à la lutte pour le titre. Vice-champion de France la saison dernière, l’OM, solide leader, se déplace à Auxerre, son surprenant dauphin qui n’a pas été à pareille fête depuis 1996, et son doublé championnat-coupe de France. Cette affiche est le tournant décisif de la saison : celle qui va probablement sceller le sort de la Ligue 1 en 2010. Si de prime abord ce duel peut en surprendre plus d’un, il marque aussi la mainmise de deux techniciens français hors-pair sur leur club respectif. Jean Fernandez, le magicien, contre Didier Deschamps, le compétiteur. Dans des styles différents et avec des moyens dissemblables, les deux hommes ont su rendre Auxerre et Marseille franchement bons.
» Jeannot » Fernandez a mis du temps à s’adapter à la Bourgogne. Pendant des mois, ce formateur dans l’âme a pris le pouls d’une ville et d’un club qui détonnent dans le paysage français. Griffée Guy Roux, l’AJA a pourtant du se résoudre à avancer même sans son » sorcier » de toujours. Ce bond en avant s’est concrétisé en 2009-10 avec le » magicien « , digne héritier du père fondateur. Après Cannes, Sochaux et Marseille notamment, Fernandez a donc étalé son savoir-faire sur les bords de l’Yonne. D’une équipe banale, habituée au ventre-mou depuis quelques saisons, il en a fait une machine à gagner. Pas de révolution, non. Juste une confiance aux hommes du sérail et à ceux sur qui le club a misé. Quatre décisions expliquent cette réussite : le maintien des briscards Mignot-Grichting en défense (accompagnés de Coulibaly et Hengbaert), la distribution clé en main de Pédretti au milieu, la reconversion de Niculae, buteur perdu devenu passeur génial, en attaquant de soutien, et les efforts consentis pour conserver Jelen. Si on ajoute à cela la mise en confiance d’Oliech et le nez pour un inconnu comme Dudka, on sait à quoi s’en tenir.
Même si Deschamps a parfois du s’adapter, il a toujours su où il voulait aller. Le Basque a pris des décisions radicales, mais dans l’intérêt du club et de son projet de jeu. Profitant d’un budget jamais proposé, DD a choisi ses hommes : Lucho, Diawara, Heinze, Mbia, Cissé… La machine a mis du temps à se lancer, mais une fois rodée elle semble irrésistible. L’OM a remporté la coupe de la Ligue et n’est plus qu’à quelques points d’un titre qui lui échappe depuis 1992, ce qui en ferait un doublé inédit dans l’Histoire du club. Le champion du Monde 1998 a enfin trouvé l’articulation idéale à une équipe qu’il veut joueuse, disciplinée et spectaculaire. En replaçant Mbia en défense, DD a trouvé un axe compétiteur. Il n’a alors pas hésité à mettre Taiwo et Heinze en concurrence, tout comme Kaboré et Cheyrou. Après les avoir presque reniés, il a aussi su tirer la quintessence des contributions d’Hatem Ben Arfa et Mathieu Valbuena. Ses choix paient (Lucho en distributeur, Cissé devant la défense) et frappent comme une évidence : le bon choix pour succéder à Erik Gerets était vraiment celui de Didier Deschamps.
Ce vendredi, la » finale » du championnat départagera à coup sûr les deux équipes. Tout autre résultat qu’une défaite serait vécu comme une délivrance du côté marseillais. Une victoire signifierait même aux Olympiens qu’ils n’auraient qu’un point à prendre face à Rennes pour être sacrés. Cette issue est bien sûr en partie le fait de Deschamps. Mais, même s’il est aujourd’hui un rival, tous les supporters marseillais ne peuvent s’empêcher d’avoir un regard teinté de respect pour le coach adverse… Il ferait un très bon vice-champion.