Argent trop cher

A l’instar des clubs français, Marseille peine en Coupes d’Europe. Si l’élimination contre le Zenit aurait pu facilement être évitée, la défaite face à Liverpool lors de la dernière journée de Ligue des Champions reste dans toutes les mémoires. Sur le terrain comme dans les coulisses, les différences de classes entre les deux clubs semblent […]

A l’instar des clubs français, Marseille peine en Coupes d’Europe. Si l’élimination contre le Zenit aurait pu facilement être évitée, la défaite face à Liverpool lors de la dernière journée de Ligue des Champions reste dans toutes les mémoires. Sur le terrain comme dans les coulisses, les différences de classes entre les deux clubs semblent évidentes. Le sujet étant à la mode, Bernard Laporte s’affaire actuellement pour déterminer les raisons des lacunes de la Ligue 1. Club français le plus populaire, où se situe l’Olympique de Marseille sur l’échiquier européen ?

Fiscalité
On ne peut pas évoquer ce thème sans aborder le sujet de la fiscalité et des charges sociales. Les charges patronales restent les deuxièmes plus importantes si on compare les cinq championnats majeurs. Ainsi, un joueur rémunéré à hauteur de 100 000 € brut coute 121 600 € à un club en France contre 100 900 € en Espagne, 112 700 € en Angleterre, 128 900 € en Italie ou encore 100 950 € en Allemagne. Côté fiscalité, ce même salaire permet au joueur d’obtenir 55 700 € net après impôts en France, contre 55 800 € en Espagne (s’il est espagnol, 76 000 € s’il est étranger), 55 450 € en Allemagne, 48 800 € en Italie et 59 650 € en Angleterre. Bien mieux lotis que les italiens, les clubs français sont principalement désavantagés par des charges patronales très élevées. Néanmoins, le fossé n’est pas si important qu’on aurait pu croire, surtout, l’imposition ne semble plus être la raison principale de l’exode des meilleurs talents. Ce sont plutôt les faibles ressources générées par les clubs hexagonaux qui ne semblent pas permettre de concurrencer leurs voisins.

DNCG
Chargée de contrôler les comptes des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2, la Direction Nationale de Contrôle de Gestion a longtemps constitué un véritable handicap pour les clubs français. Officiellement, il semblerait que son influence ait diminué dans la mesure où les clubs espagnols et italiens, notamment, ont fait de véritables efforts pour réduire leurs dettes et limiter leur déficit annuel. Ainsi, en imaginant la création d’une DNCG européenne, souvent évoquée par les dirigeants des clubs français, le Barça, le Real et le Milan AC, par exemple, seraient désormais tirés d’affaire. Seuls l’Inter Milan et Chelsea vivent largement au-dessus de leurs moyens mais leurs propriétaires respectifs, aux moyens considérables, le leur permettent. Bien entendu, on peut s’interroger sur la véracité des chiffres qui circulent en dehors de nos frontières et il est toutefois évident que notre DNCG empêche de mener une politique véritablement à risque ou à plus long terme. Longtemps placé dans le collimateur de l’organisme de surveillance, Marseille est tranquille cette saison, en particulier du fait de sa participation à la Ligue des Champions.

Droits TV
L’OM a obtenu en fin de saison dernière 42,9 millions d’euros pour la Ligue 1, sachant que la négociation collective ne favorise pas le club marseillais. Il est en effet non seulement lésé au moment des pourparlers (son image étant associée à celle de nombreux clubs qui n’intéressent personne) mais aussi lors de la redistribution (car ces mêmes clubs se servent copieusement sur le gâteau). En Espagne et en Italie, la négociation est individuelle. Le résultat obtenu est en conséquence bien plus intéressant pour les grosses écuries que sont la Juventus (124 M€/an), l’Inter Milan et le Milan AC (100 M€/an), le Real Madrid (157 M€/an) ou Barcelone (143 M€/an). En Angleterre les droits TV, négociés comme en France de manière globale, atteignent des montants bien plus importants (1,2 milliards d’euros/an contre 668 millions en France). Bref, dans ce domaine, le club marseillais n’est pas libre et pourrait s’associer à Jean-Michel Aulas qui s’emploie à obtenir une répartition plus intéressante pour les dits « gros clubs ».

Sponsors
Les déclarations de Robert Louis-Dreyfus lors du procès des comptes de l’OM jettent le trouble (« le montant payé est de moitié inférieur environ à celui des sponsors de Lyon et du Paris SG. Et l’OM a au moins la même notoriété »). L’argent investie par le sponsor principal de l’OM (selon les sources 5 à 6 M€/an) reste ainsi à des années lumière de celui touché par les grands clubs européens (Juventus 24 M€/an, Manchester United 20 M€/an, Real Madrid 18 M€/an, Bayern Munich 18 M€/an, Milan AC 15 M€/an, Chelsea 14M€/an, …) et même inférieur à celui de Lyon (9 M€/an) ou le PSG (7 M€/an). Il serait bon de faire en sorte que ces accords restent soumis à une concurrence loyale. Au regard de sa popularité, le club pourrait quasiment doubler ses gains. Selon le club, l’OM bénéficie quand même du soutien de 3 millions de supporters et de 9 millions de sympathisant motivés…

Merchandising
Il reste de nombreux progrès à faire pour atteindre le niveau des concurrents européens. Dans ce domaine, le club olympien semble toujours avoir un temps de retard. Thierry De La Brosse évoquait en juin 2007 un chiffre d’affaire d’environ 10 millions d’euros concernant le merchandising. La vente des maillots constitue probablement le point fort des Phocéens, tout au moins comparé à ses concurrents hexagonaux. Avec une estimation à 350 000 pour la saison en cours avec la participation à la Ligue des Champions, le chiffre de l’an passé sera largement dépassé. A titre de comparaison, le Real Madrid vend deux millions de maillots par an et le Bayern Munich faisait déjà un chiffre d’affaire trois fois supérieur à celui de l’OM en 2005-2006… Il reste donc à faire de réels progrès. Concernant l’équipementier, une fois de plus, le club phocéen semble sous-évalué par ses dirigeants. Le contrat qui le lie avec Adidas mentionne 7,5 millions d’euros par an. A titre de comparaison, Barcelone touche 30 millions d’euros par an et le Real Madrid 18 millions. L’attachement historique du club à la marque allemande ne semble pas porter ses fruits. L’Equipe de France, qui a choisi de changer d’équipementier, a prouvé qu’il pouvait être bénéfique de mettre les différents prétendants en concurrence.

Recettes guichets
Malgré l’augmentation faite en début d’année, Marseille est loin des montants obtenus par les grands ténors européens. Manchester United (137,5 M€), Arsenal (134 M€) et quelques autres clubs anglais écrasent toute concurrence dans ce domaine. L’an passé, l’OM a gagné 18,4 millions d’euros par ce biais. Si la manne financière qui en résulte Outre-Manche est évidemment conséquente, le pouvoir d’achat inférieur des Français ne devrait pas permettre dans tous les cas d’obtenir un montant aussi élevé. Par ailleurs, une augmentation des tarifs, en virage notamment, impliquerait un embourgeoisement du stade qui pourrait entraîner une perte de l’ambiance populaire qui y règne et le rôle citoyen et social qu’il tient dans la ville. Or l’ambiance, au Vélodrome, c’est aussi ce qui fait la différence avec les autres clubs. Les recettes devraient tout de même bien augmenter cette année.

Compte tenu de tous ces chiffres, il reste évident que la marge de progression du club est énorme. Néanmoins, l’influence de Robert Louis-Dreyfus semble freiner la croissance dans les domaines du sponsoring notamment. En dehors de la baisse éventuelle des charges patronales, la seule mesure pouvant vraisemblablement changer la donne serait la permission de négocier individuellement les droits télévisuels. Côté merchandising, il est évident que des participations régulières à la Ligue des Champions pourraient permettre au club de s’envoler. La seule possibilité restante (en dehors de la vente) pour dégager de l’argent frais (mais éphémère), demeure l’entrée en bourse. Une autre donnée pourrait venir changer cette donne : la FIFA étudierait actuellement la possibilité de mettre en oeuvre le système du 6+5. Il s’agirait d’obliger les clubs à aligner au moins six ressortissants de leur pays sur le terrain. Cette mesure pourrait permettre à la Ligue 1 de conserver bon nombre de ses jeunes talents et l’OM, en tant que club puissant hexagonal, en tirerait évidemment un énorme bénéfice.