Arrivé comme le messie après le départ d’Eric Gerets, Didier Deschamps a confirmé tout le bien et le mal qu’on pouvait penser de lui durant ces 3 années riches en titres. Hier soir, les dirigeants de l’Olympique de Marseille et les représentants du coach phocéen ont trouvé un accord pour sceller le départ de l’ancien capitaine de 1993 qui s’inscrit clairement comme une rupture dans la politique du club. Retour sur ces 3 saisons mouvementées.
Le départ de Diouf et la tentative Bernès
Arrivé par la volonté de Pape Diouf en juin 2009 après le départ d’Eric Gerets, Didier Deschamps voit son président se faire débarquer à la stupeur générale quelques jours après par le propriétaire du club, Robert Louis-Dreyfus. Le nouvel entraineur de l’OM choisit de ne pas prendre le parti de Diouf et d’accepter cette décision. Jean-Claude Dassier prend alors la tête de l’OM et, sur proposition de Deschamps, annonce vouloir faire revenir au club l’un de ceux qui avaient quelques années plus tôt lâché Bernard Tapie et l’OM dans l’affaire VA et qui est son agent et ami : Jean-Pierre Bernès. Le tollé est général au sein des supporters et en interne. C’est notamment José Anigo qui montre au créaneau et annonce qu’il met sa démission dans la balance. La piste Bernès est écartée mais c’est le début d’une grande histoire d’amour entre Deschamps et Anigo.
Une première saison couronnée de succès
Pour calmer la colère populaure suite au départ du bien-aimé Pape Diouf, Robert Louis-Dreyfus choisit de lâcher la masse salariale et les dépenses avec l’achat de joueurs aguerris (Diawara, Abriel, Mbia) et d’envergure internationale (Lucho, Heinze). Les deux Argentins arrivent notamment grâce à Didier Deschamps qui contacte lui-même ces joueurs et les décide à venir sur la Canebière. Leurs salaires sont bien au dessus des moyens du club mais qu’importe. Les résultats ne se font d’ailleurs attendre puisque l’OM est sacré champion pour la première fois depuis 17 ans quelques mois plus tard. Avide de titres, l’ancien capitaine des Bleus 98 fait aussi tout pour gagner la Coupe de la Ligue qui sera en quelque sorte son trophée fétiche à l’OM avec 3 trophées en 3 ans, un record. La ville est en liesse et Didier Deschamps devient le héros du club. Il en profite pour écarter le préparateur physique, Christophe Manouvrier, pour un de ses fidèles, Antonio Pintus, ce qui sera un échec cuisant. Il fera la même chose avec l’entraineur des gardiens, Nicolas Dehon, sans qu’on voit un changement significatif dans les performances de Steve Mandanda. Didier Deschamps veut les siens autour de lui et il les obtient.
OM : un mercato 2010 qui met le club sous tension
Fort de ce succès, Didier Deschamps arrive à mettre José Anigo dans un placard lors du mercato estival 2010. Le coach marseillais veut absolument Luis Fabiano et propose 15 millions d’euros pour s’attacher les services du Brésilien âgé alors de 30 ans mais le FC Séville en veut 18 millions (il partira 6 mois plus tard pour 3 fois moins). Jean-Claude Dassier refuse et, devant l’absence de recrue, remet Anigo en selle. A partir de là, les relations entre le président et son entraineur se tendent. Dans les jours qui suivent, Loïc Rémy et André-Pierre Gignac, deux seconds choix de Deschamps, signent à l’OM. Côté départ, Mamadou Niang qui souhaitait partir est autorisé à quitter Marseille contre l’avis de l’entraineur olympien (qui ne met pas cependant sa démission dans la balance) et Hatem Ben Arfa – que Deschamps voulait dans un premier temps vendre puis ensuite conserver – casse tout dans le bureau de Dassier pour qu’on fasse de même pour lui. Eclatant avec Newcastle, Ben Arfa manquera cruellement à Marseille les saisons suivantes.
La saison 2010/11 est un demi-échec avec une seconde place en L1 et deux titres (Coupe de la Ligue et Trophée des Champions). L’absence de projet et de qualité de jeu commence à éveiller des inquiétudes, des tensions. Entre Anigo et Deschamps, ce n’est pas encore la guerre ouverte mais on en est près. Entre Dassier et Deschamps, les tensions ont atteint le point de rupture. Deschamps obtient le départ de ce dernier même si, pour d’autres raisons, il est écarté par Vincent Labrune qui le remplace.
Mercato 2011 : l’OM au régime minceur
Malgré une place qualificative en Champions League, une participation pour la compétition jusqu’aux huitièmes (matchs contre Manchester United), deux titres (Trophée des Champions et Coupe de la Ligue), l’OM se retrouve quasiment sans un sou pour renforcer le groupe. Didier Deschamps obtient enfin le joueur qu’il courtisait depuis plusieurs mercatos, Alou Diarra. A côté du vieux briscard des Girondins, Amalfitano, Nkoulou et Morel dont on se demande à qui revient la paternité. José Anigo est lui officiellement écarté du secteur sportif pour toute la saison. L’OM est désormais le seul club au monde où le directeur sportif ne s’occupe pas de sportif. Cette situation singulière va bien sur aboutir à un désastre à la faveur d’un début de saison catastrophique (seulement 9 points engrangés lors des 10 premières journées). Deschamps conserve pourtant la confiance de l’actionnaire, du président et de la plupart des supporters, ce qui constitue dans un contexte d’échec sportif une exceptionnelle adhésion au technicien bayonnais.
De la crise sportive à la crise de nerf
Alors que l’équipe n’arrive pas à revenir au niveau qui devrait être le sien, la situation se tend et, comme dans tout club, les choix du coach commencent à être discutés en interne (joueurs, dirigeants) comme en externe (journalistes, supporters). En prenant la totalité de la responsabilité du secteur sportif, Didier Deschamps a pris le risque de s’isoler et d’être seul au front. Il ne peut compter sur Anigo bien évidemment, sur Labrune qui est peu souvent à Marseille et qui préfère les coulisses aux lumières. L’OM finit cette saison avec un classement catastrophique en L1 mais une réelle réussite en Champions League (quart de finale) ce qui constitue le meilleur résultat de l’Olympique de Marseille dans cette compétition depuis 1993. On pourrait ajouter une autre Coupe de la Ligue à ceci près que désormais tout le monde s’en fout.
Au terme de la saison, Didier Deschamps reporte son échec sportif sur d’autres que lui et demande que meilleur ennemi, José Anigo, soit viré de l’OM. Il affirme être incapable « de travailler dans ces conditions » et on peut le comprendre. Vincent Labrune et Margarita Louis-Dreyfus refusent et contraignent donc le coach marseillais à quitter l’OM la veille de la reprise de l’entrainement. Triste fin après 3 années de titres majeurs et mineurs mais aussi avec beaucoup de regrets. Mais gageons qu’un jour, à l’instar d’Eric Gerets, Didier Deschamps reviendra entrainer l’OM.