Exclu FM, Ménès (1/3) : « L’OM, le club où j’ai le plus de potes »

Pierre Ménès, journaliste de Canal+, nous a accordé une interview. Dans cette première partie, il évoque son passage à Canal+, son rapport avec l’OM et les dernières saisons phocéennes.

Six ans ont passé depuis notre dernier entretien avec Pierre Ménès. Il s’agissait d’un appel au calme avant le match retour contre l’Atletico Madrid, en Ligue des Champions, fin 2008. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. Le journaliste s’est lancé dans une nouvelle aventure sur Canal+, tandis que l’OM a continué son petit bonhomme de chemin, alternant le très bon et le pas bon du tout. Voici donc la première des trois parties de l’interview. Comme à son habitude, il ne fait pas dans la langue de bois.

SA CARRIÈRE, SON RAPPORT AVEC L’OM

1/ Alors, l’esprit Canal, cela existe vraiment ? L’ambiance est-elle aussi bonne que sur RTL ou M6 ?
L’esprit Canal, cela date de l’époque Pierre Lescure, de Greef, les Nuls, les débuts des guignols… C’est quelque chose ! Je pense qu’aujourd’hui, pour les gens qui aiment bien Canal, l’esprit Canal, c’est de l’impertinence, de la déconne et de l’information. C’est ce que j’essaie de faire au Canal Football Club. En termes de football, si on devait faire des comparaisons, je suis passé des Girondins de Bordeaux au Real de Madrid. Il y a des moyens beaucoup plus forts et il y a aussi beaucoup plus de monde. Pour qu’il y ait un esprit familial, il faut que le groupe soit resserré. Là, c’est différent. C’est une chaîne détentrice de droit, qui a la meilleure émission de football de la télévision française. Ce n’est pas 100% foot, que l’on faisait avec Estelle devant 400 000 personnes, les bons jours.

2/ On se rappelle que tu as été abonné au Parc des Princes. Est-il possible de rester « supporter » quand tu es journaliste ?
C’était de 1977 à 1983. Quand tu habites à Paris, pour aller voir du football, le Parc des Princes cela reste ce qu’il y a de mieux. Rester supporter ? Non tu ne peux pas du tout. Pour se dégoûter du PSG, il faut travailler sur le PSG. Je l’ai fait de longues années sur L’Équipe. Aujourd’hui, on est dans une autre sphère. Tu as un joueur en conférence une fois de temps en temps, tu dois prendre rendez-vous des semaines à l’avance pour un entretien privé… Moi quand je suivais le PSG ou l’OM, car je suivais l’OM aussi, tu allais à l’entraînement et tu parlais avec les joueurs qui voulaient bien te parler. Tu pouvais voir tout le monde. C’était très différent. La source d’information était beaucoup plus grande à cette époque-là qu’aujourd’hui, où tout est super contrôlé. Je pense que maintenant cela m’emmerderait profondément de suivre le Paris-Saint-Germain. Tu n’étais jamais tranquille, il y avait toujours une merde, dans ce club-là. C’était impossible d’avoir une semaine peinarde.

3/ Ton rapport avec l’OM, club dont tu te sentais finalement assez proche, a-t-il évolué ces dernières années ?
Non, parce que l’OM reste le club où j’ai le plus de potes. Et de très loin. Il y a vraiment beaucoup de joueurs à Marseille que j’apprécie énormément sur le plan humain, ou avec qui je rigole bien. Cela a toujours été le cas. Évidemment, il y a eu l’époque Abedi Pelé. Plus tard il y a eu Souley (Diawara, Ndlr) et Mamadou Niang. J’ai toujours André Ayew, mon neveu. Parce qu’il m’appelle Tonton, André. J’ai un peu de mal parfois à comprendre l’institution Olympique de Marseille et l’attitude de leurs supporters. Pas au stade, mais la manière qu’ils ont d’émettre leurs opinions, cette sorte de parano perpétuelle que l’on sent notamment bien depuis le but accepté à Saint-Étienne, par exemple. À part Imbula, que je connais très peu car je ne l’ai vu une fois pour le trophée de meilleur joueur de Ligue 2 et une fois au CFC, ou Mendy que je ne connais pas… Franchement, mis à part Romao, je m’entends vraiment très très bien avec tous les joueurs. C’est plutôt Romao qui ne s’entend pas avec moi d’ailleurs.

LES DERNIÈRES SAISONS PHOCEENNES

4/ De 2010 à 2012, l’OM a remporté ses premiers titres depuis près de vingt ans. Penses-tu que seul Didier Deschamps pouvait parvenir à conjurer le signe indien ?
Évidemment, ce n’était pas les fortunes colossales que dépense le PSG version Qatar, mais l’OM de Didier Deschamps était l’équipe la plus riche de France. L’OL commençait à avoir des soucis, le PSG était sous Colony Capital et faisait plus du bricolage qu’autre chose. L’OM avait déjà les deux joueurs les plus chers du championnat, avec Lucho González et Gabriel Heinze. Après, Deschamps, c’est comme partout, il a des résultats. On ne peut pas dire que la reconnaissance ait étouffé les Marseillais parce que visiblement il a quand même beaucoup divisé après le titre dans son conflit avec Anigo. Mais pour gagner, c’est mieux d’avoir Deschamps. Enfin pour gagner, c’est mieux d’avoir Deschamps avec une grosse équipe.

5/ La guerre Anigo/Deschamps a ensuite plongé le club dans le marasme. Cela rappelle les disputes Courbis/Marchand ou Dubiton/Tapie. Qu’aurais-tu fait de différent pour éviter toutes ces tensions, à la place des Louis-Dreyfus ?
Je ne peux pas répondre à cela, parce que je ne juge que sur les déclarations. Les deux me parlaient et tu sentais bien qu’il n’y avait aucune confiance entre José Anigo et Didier Deschamps. Les deux avaient leurs arguments. Malgré ces informations-là, je ne reste qu’un avis extérieur.

6/ En 2012-2013, Élie Baup a remis l’équipe à l’endroit et accroché une place pour la Ligue des Champions, remportant notamment 18 succès par un but d’écart. Son travail est-il reconnu à sa juste valeur ?
Si tu compares l’OM de Baup et l’OM de Bielsa, tu peux faire le distinguo entre deux choses. D’un côté, c’est le résultat. Baup, deuxième du championnat, rien à dire avec cette équipe-là. De l’autre, tu as la qualité du jeu proposé. Je pars du principe de base que quand tu joues toujours bien, tu finis par avoir des résultats. L’OM de Baup, le Lille de Girard ou le Monaco de Jardim, c’est le contraire. Ce que l’on demande à un technicien, avant tout, c’est de tirer le meilleur parti possible de son groupe. Ce n’est pas de la NBA. Si tu gagnes et que tu fais du spectacle, là effectivement tu as tout bon. Hier (mercredi 25 février 2015, Ndlr), il y a eu Arsenal-Monaco (1-3). Ce qu’a fait Monaco, c’est de très très très loin le meilleur match sous l’ère Jardim. Sans oublier de noter qu’ils ont marqué trois buts en contre. Ce qui est logique d’ailleurs. L’OM d’Élie gagnait 1-0, comme l’année dernière le LOSC, comme Monaco cette année. Cela m’intéresse plus de voir jouer le Lyon de Fournier, l’OM de la première partie de saison de Bielsa, que le Monaco de Jardim. Même si on s’aperçoit qu’au niveau européen, Monaco cartonne. Parce que, quand tu te tapes autant de matchs que moi dans une semaine, voir un bon match de foot… L’autre jour, j’ai regardé Troyes-Le Havre et j’ai vu un bon match de foot, avec des équipes qui pratiquent un beau football. Alors, évidemment, ils n’ont pas des superstars dans leur équipe qui permettent de faire la différence ou de gagner quand tu joues un peu moins bien, mais je suis contre la dictature du résultat. Sinon, mon métier n’a plus aucun intérêt : je déboule le dimanche soir après les matchs, celui qui a gagné il est magnifique, celui qui a perdu est le roi des cons. C’est un petit peu réducteur.

7/ C’est aussi la saison de ta rencontre avec Joey Barton. Tu nous avais bien fait marrer dans le court-métrage de Rod Fanni. Alors, est-il vraiment fou l’Anglais ?
Il est vachement sympa et il connaît bien le football. Cela a été une journée assez incroyable. Il y a donc eu les Tweets de Barton, que les gens ont pris comme une attaque terrible mais moi beaucoup moins car je sais comment les Anglo-saxons utilisent Twitter. C’est quelque chose de beaucoup plus trash que chez nous. J’avais pris cela plutôt avec humour et lui avais répondu avec humour. Je pense qu’il a fait des Tweets beaucoup plus déplacés sur d’autres personnes que sur moi. Et puis effectivement, quand Rod faisait ses vidéos, il m’a proposé d’aller faire un petit truc avec Joe au golf. On s’est super bien entendu, c’est même moi qui lui ai soufflé la réplique « va bouffer ta salade ». Le plus drôle, c’est que le soir, comme c’était à Mandelieu pendant le festival de Cannes, Rod avait organisé le dîner de fin de saison de l’Olympique de Marseille sur une plage. Je me suis donc retrouvé au dîner avec les joueurs de l’OM. Enfin pas tous. Quelques-uns n’étaient pas là. Le plus petit d’entre eux n’était pas là.

8/ En 2013-2014, Élie Baup et José Anigo ont semblé se heurter à l’indiscipline de leurs joueurs. Ne penses-tu pas qu’il manquait justement un mec comme Barton dans le vestiaire marseillais ?
Je pense que le recrutement d’Ocampos est inutile. Il rendra peut-être quelques services et marquera quelques buts, mais je pense que l’OM n’a pas de problème pour marquer des buts. Le gros déficit de l’OM, il est au poste de milieu défensif. Alors est-ce que cette fin de saison va nous permettre de voir André Ayew à ce poste-là ? En tout cas au niveau de son positionnement au milieu du terrain, il manque un Barton. Après, il n’a pas trop fait d’écart de conduite en France. Je pense qu’en Angleterre, ils cultivent ce côté bad boy et ça lui permettra de faire sa biographie. Il faut savoir que les bios de footballeurs en Angleterre se vendent très très bien. Je pense qu’il doit cultiver cela pour faire un très très beau livre à la fin de sa carrière.

Fin de la première partie de l’interview. À bientôt pour la suite !