Un match d’hommes. Voilà la meilleure façon de présenter ce quart de finale retour de la Coupe de l’UEFA. Un peu bourru, pas très finaud me direz-vous ; mais pourtant mercredi soir, il n’y aura de place ni pour les couards ni pour les pleutres. Les Noirs et Bleus ont annoncé la couleur, multipliant les déclarations aux odeurs de souffre : » Nous vous attendrons à San Siro » dit Almeyda au site officiel milanais, interpellant ses futurs adversaires. Christiano Zanetti quant à lui préfère ignorer ces derniers… pour mieux les mépriser ! en présumant fortement de leurs chances de qualification. Un dosage pas très subtil de mauvaise foi, de provocation et d’intimidation : c’est aussi ça l’expérience.
L’expérience, c’est justement ce qui risque de manquer à l’OM. Hormis Barthez, et dans une moindre mesure Marlet et Mido, qui parmi nos joueurs peut se targuer d’avoir vécu des matches d’un tel enjeu ? Personne. C’est dire l’importance qu’auront ces trois hommes mercredi soir. Fabien Barthez, parce que la défense ne pourra repousser tous les assauts adverses ; Steve Marlet et surtout Ahmed Hossam Mido, car le navire olympien devra voguer sans sa tête de proue ivoirienne. Voilà la grande inconnue de la soirée : Mido, libéré de la présence envahissante de son ex compère et nouveau rival Didier Drogba, saura-t-il s’imposer et compenser l’absence du sauveur officiel de l’OM ? On peut compter sur sa hargne et sa volonté, mais la fréquentation désormais régulière du banc de touche n’a-t-elle pas érodé sa confiance ? Un coup de tête, un seul, suffirait à prouver que non…
Mais les événements récents ont montré que l’expérience n’était pas le seul facteur de réussite en Coupe d’Europe. Le match aller bien sûr, où l’Inter n’était grand et Marseille petit que sur le papier ; et bien évidemment la victoire des jeunes Monégasques sur les cadors madrilènes. Deux matches qui ont montré à quel point l’enthousiasme et l’envie pouvaient déplacer des montagnes de trophées et de médailles. Deux matches qui sont pour nous autant de raisons d’espérer. Car à défaut de noms ronflants et de palmarès à rallonge, il faudra aux Marseillais beaucoup de coeur pour se qualifier. On se moque souvent – à juste titre – des maximes de supporters : » mouiller le maillot « , » ne rien lâcher « … Nos joueurs devront pourtant s’imbiber mercredi soir de cet état d’esprit guerrier qui fait les grands matches et – parfois – les grandes victoires.
Un combat physique et psychologique donc, qui comportera aussi une forte dimension tactique : en plus de leur coeur, les olympiens devront se servir de leur tête pour faire déjouer leurs adversaires. Car à vrai dire l’avantage acquis au match aller soulève autant de problèmes qu’il n’en résout. Un but à zéro, c’est trop pour partir franchement à l’attaque, mais pas assez pour se recroqueviller dans son camp. Il faudra donc rester concentrés, tout en essayant de profiter un maximum des quelques espaces libérés par des Milanais contraints de se découvrir. Il serait par contre dangereux et utopique de refuser le jeu en attendant les Lombards venir. Le trident offensif Vieri – Martins – Recoba pouvant faire la différence sur un éclair de génie, mieux vaut sevrer de ballon que de défier individuellement ces artistes du ballon rond.
Voilà en définitive un match pour José Anigo : à lui de transcender ses troupes, à lui aussi de nous prouver qu’il est plus qu’un homme de vestiaires. On oppose souvent son enthousiasme aux prétendues qualités tactiques de son prédécesseur : puisse-t-il nous prouver à San Siro que la science du football ne tient pas dans un cahier à spirales, et qu’il ne suffit pas de s’autoproclamer » chercheur » pour trouver les bonnes formules.
» Avec la tête, avec le coeur » dit la chanson. » Ne rien lâcher » dit le supporter. Les mots les plus simples sont parfois les plus pertinents.