A quelques jours de la confrontation entre l’AJ Auxerre et l’Olympique de Marseille, nous avons contacté Jean Fernandez afin de lui poser des questions sur son passage à l’OM, et avoir son point de vue sur l’OM 2006/2007.
De retour de Belgrade, et malgré une courte défaite en Coupe UEFA, il nous a gentiment consacré un peu de temps en exclusivité pour OMplanète.
Bonjour Jean. Avant de commencer nous souhaiterions prendre des nouvelles de votre santé. Tout va mieux depuis les pépins de la saison dernière ?
Ca va beaucoup mieux. Il y a eu des soucis ponctuels, en particulier à la hanche mais l’opération était prévue de longue date. En tout cas, tout va pour le mieux maintenant.
A quel moment de votre carrière avez vous pris conscience que le métier d’entraîneur était fait pour vous ?
Très vite. Dès que j’ai commencé ma carrière de joueur, je savais que j’allais devenir entraîneur. Comme je le dis toujours, il y a les entraîneurs par vocation et les entraîneurs par nécessité. Souvent, des joueurs qui arrivent en fin de carrière et qui entraînent car ils ne savent pas trop quoi faire. Moi, c’était vraiment par vocation. Très tôt, je me suis intéressé à la mise en place tactique, aux entraînements, à la psychologie des joueurs etc… J’ai vu que j’avais des aptitudes et donc à 30 ans, lorsque j’ai arrêté ma carrière de joueur, je suis très vite devenu entraîneur à Cannes en deuxième division. Tout a été très vite pour moi.
En tant que joueur et entraîneur, quels sont vos meilleurs souvenirs, vos titres préférés ?
Ma plus forte émotion de joueur, c’est quand on a gagné la Coupe de France avec Marseille en 76. J’ai vécu des bons moments dans les autres clubs où j’ai évolué, mais rien de comparable. Pendant les vingt années en tant qu’entraîneur, j’ai beaucoup bourlingué et j’ai, par exemple, connu de très bons moments en Arabie Saoudite où nous avons gagné toutes les compétitions nationales et asiatiques. Mais les années Tapie de 91 à 93 en tant qu’adjoint de Raymond Goethals m’ont fait vivre les moments les plus forts. La finale de Bari, les titres de champion, le titre européen et la vie au quotidien avec une grande équipe comme l’OM.
On peut donc dire que l’OM a toujours été votre club de coeur, en tant que joueur et en tant qu’entraîneur ?
Incontestablement, oui.
Justement parlons de l’OM. Quels sont les joueurs pour lesquels vous avez eu un rôle prépondérant dans le recrutement l’an passé ?
Le recrutement a toujours été un travail d’équipe entre le président, le directeur sportif et l’entraîneur. J’ai pu donner mon avis surtout à propos des joueurs que je connaissais et avec qui j’avais déjà travaillé. Des garçons comme Ribéry, Maoulida, Pagis, Oruma ou Niang. Quand on connait le joueur, c’est évidement plus facile, on a moins de chances de se tromper.
Ensuite des garçons comme Lamouchi ou Cana étaient quand même des joueurs connus et j’ai été très positif quant à leur arrivée. Mais le travail d’équipe est la base du recrutement.
Avez-vous été surpris de l’apport décisif et immédiat de joueurs comme Toifilou Maoulida et Mika Pagis, pourtant arrivés au mercato d’hiver ?
Non, pas du tout. J’ai eu la chance de travailler avec eux à Metz et Sochaux. Toifilou était clairement l’homme de la situation à droite et Mika devant. C’était aussi le cas de Lorik Cana au milieu, sachant qu’après un mois de compétition, nous avions besoin d’un joueur comme lui. Pour Maoulida et Pagis, avec la difficulté de l’arrivée en cours de saison, la période d’adaptation a été infime. L’un des succès de l’OM l’année dernière est d’avoir misé non seulement sur de bons joueurs, mais aussi d’avoir tenu compte de l’homme. Parfois, de bons joueurs ont un caractère difficile. Toifilou et Mika, je savais que c’était des hommes bien.
Si vous aviez quelque chose à refaire sur la saison dernière vous changeriez quoi ?
Si je pouvais revenir en arrière, j’ai déjà abordé le sujet à la fin de la saison dernière, je n’aurais pas disputé l’Intertoto. Certes, nous avons pu livrer des matchs de qualité contre la Lazio ou le Deportivo La Corogne, mais les 16 matchs européens nous ont coûté cher en fin de saison.
C’était une décision présidentielle, je m’y suis donc plié. Mais cela me laisse quelques regrets car sans ces matchs, je suis persuadé que nous aurions terminé deuxième ou au pire troisième de ce championnat.
Quels rapports avez-vous gardé avec Pape Diouf et José Anigo maintenant que vous n’êtes plus entraîneur de l’OM ?
Nous avons gardé de très bonnes relations. Mon départ était un choix personnel, ni Pape Diouf ni José Anigo ne m’ont demandé de partir. Il n’y a pas eu de complications et j’ai eu de très très bonnes relations avec eux. Maintenant, je ne suis plus entraîneur de l’OM, et j’ai d’autres priorités. Eux ont la priorité de continuer de faire de l’Olympique de Marseille un grand club.
Et avec les joueurs, vous avez encore des contacts ?
Vous savez, aujourd’hui nous sommes trop pris par nos occupations. Je garde de très bons souvenirs de mon passage à l’OM, ça n’a pas été facile de partir. Maintenant, chacun a ses obligations.
Concernant votre départ, nous avons lu et entendu tout et son contraire. Les raisons qui ont amené votre départ restent floues. Pouvez-vous nous éclaircir à ce sujet ?
Tout ce qu’on a raconté, c’est n’importe quoi… J’ai pris une décision dans mon intérêt et dans l’intérêt collectif. Je ne voudrais pas qu’on me donne l’image d’un mercenaire, mais après avoir analysé la saison j’ai estimé qu’il était bien que je parte et que le club prenne un autre entraîneur. C’est un choix personnel, et non pas un choix qui m’aurait été dicté. Des gens ont fabulé sur des choses qui n’existent pas.
Concernant la saison qui débute, que ressentez-vous à propos de votre nouveau défi avec l’AJ Auxerre ?
Le groupe auxerrois est très jeune, il va donc falloir être patient. Un peu comme l’année dernière, je suis à la tête d’une équipe qu’il faut reconstruire. Nous n’avons pas au autant de changements à l’AJA qu’à l’OM l’année dernière. Mais les départs de joueurs emblématiques comme Lachuer ou Violeau, et le retour de prêt de Peguy Luyindula ont été compensés par l’arrivée de jeunes joueurs. Je ne parle pas de saison de transition, mais je pense que nous connaîtrons une période d’adaptation beaucoup plus longue.
Quel joueur auxerrois vous a le plus impressionné ?
Il n’y a pas de joueur qui ressorte du lot, mais beaucoup de bons jeunes joueurs. Il y a Kaboul qui est international espoir, et beaucoup de milieux de terrain de qualité comme Cheyrou ou Kahlenberg… J’ai de bons joueurs mais pas un qui ressort du lot.
Vous refusiez de jouer la Coupe Intertoto avec l’OM, mais vous l’avez disputé avec Auxerre. Une explication ?
Nous ne sommes pas dans le même contexte… Notre ambition est de faire la meilleure saison possible, pas de disputer la Champion’s League… Si, avec Auxerre, on peut jouer les premiers rôles et titiller les grosses équipes, tant mieux. Mais l’Olympique de Marseille joue une qualification pour la Ligue des Champions ou, au pire, une place européenne. Ne pas y arriver serait un échec. Pour Auxerre, aujourd’hui, ce n’est pas une priorité.
Vous avez collaboré avec Albert Emon l’année dernière. A-t-il la carrure pour réussir à l’OM ?
Oui, sans aucun problème. La décision qui a été prise concernant Albert Emon était la décision qu’il fallait prendre. Quand j’ai vu que le club partait sur des pistes étrangères, je pensais qu’Albert Emon était la meilleure solution. Il a été présent dans la construction et la mise en place de l’équipe, il connaît bien le contexte marseillais, je pense qu’il a la dimension pour réussir.
Vous connaissez très bien Franck Ribéry. Quel est votre point de vue sur cette saga qui a animé l’été des supporters et des journalistes ?
Les choses vont très vite pour Franck. La Coupe du Monde a été extraordinaire pour lui, moins pour l’Olympique de Marseille… Sans le Mondial, on n’aurait pas parlé de Franck Ribéry cet été. Le fait d’avoir été une révélation et d’avoir côtoyé le très haut niveau lui a forcément donné envie de jouer dans des clubs qui participent à la Champion’s League…
Mais je le connais bien, et même si les choses vont très vite, il a encore le temps. Pour en avoir discuté avec lui avant de partir de Marseille, je lui ai dit que le mieux était de continuer avec l’OM. Malgré ce qu’on peut dire, Marseille reste un grand club, et il y est bien. Il est bien avec les dirigeants, bien avec les joueurs, les supporters… Tout a été trop vite !
Son agent à l’air d’avoir joué un rôle important dans cette histoire, non ?
Francky a quand même suffisamment de personnalité. Le fait de ne pas jouer la Champion’s League l’a fait hésiter. Mais il va rester… et faire une grande saison avec l’OM !
Même si cela implique qu’il soit présent à l’Abbé Deschamps le 19 août prochain ?
Oui, même si on se connaît bien, Franck viendra à Auxerre pour gagner le match ! On a pu dire beaucoup de choses à son sujet, mais Franck est un garçon professionnel et a le football dans le sang. Une fois sur le terrain il fera tout pour gagner, vous n’avez aucun souci à vous faire !
Pour cette saison 2006/2007, vous situez le potentiel de l’OM à quel niveau ?
Dans les 5 premiers, je les vois même bien partis pour se qualifier pour la Champion’s League. Le plus « difficile », c’est le travail de reconstruction qui a été fait la saison dernière. L’équipe a connu une certaine stabilité, et il ne lui manque plus que trouver le bon rythme pour connaître plus de réussite.
Et en ce qui concerne l’AJA ?
Il faut attendre un peu pour avoir une idée précise. Nous avons un groupe jeune et quelques petits changements. Il faudra que nous soyons prudents.
Que pouvons-nous vous souhaiter pour cette saison ?
Les meilleurs résultats possibles. Au niveau de la santé, tout va mieux, les soucis sont oubliés. Alors on peut me souhaiter la meilleure saison possible !
Merci Jean d’avoir répondu à nos questions, et bonne chance à l’AJ Auxerre !