L’Atletico, club martyr ?

Mardi 14 octobre : l’UEFA suspend le Stade Vicente Calderon et condamne l’Atletico Madrid à jouer ses deux prochains matchs européens à un minimum de 300 kilomètres de chez lui suite à la rencontre disputée contre l’OM en Ligue des Champions. Le club espagnol se voit reprocher son « manque d’organisation » et le comportement raciste et […]

Mardi 14 octobre : l’UEFA suspend le Stade Vicente Calderon et condamne l’Atletico Madrid à jouer ses deux prochains matchs européens à un minimum de 300 kilomètres de chez lui suite à la rencontre disputée contre l’OM en Ligue des Champions. Le club espagnol se voit reprocher son « manque d’organisation » et le comportement raciste et violent de son public et de sa police. Elle sanctionne également Javier Aguirre, entraîneur du club ibérique, de deux matchs de suspension pour « insultes ». Jusque-là, rien ne semble choquant, sauf peut-être l’intervention de l’UEFA qui ne nous avait pas habitué à prendre ses responsabilités. Pourtant, depuis l’annonce de cette dernière, rien ne semble plus tourner rond de l’autre côté des Pyrénées. Devant la déferlante hallucinante des arguments hispaniques, essayons d’y voir plus clair :

Racisme et violences gratuites
Le match de Ligue des Champions Atletico Madrid-Olympique de Marseille a laissé un amer goût de traquenard. Abusant de sa toute puissance, la police espagnole s’est rendue à cette occasion coupable d’humiliations et de violentes agressions tout au long de la soirée, faisant dix blessés dans les rangs de supporters aux intentions pacifiques. Sans l’intervention des deux policiers français présents sur les lieux et des dirigeants olympiens, l’affaire aurait sans aucun doute dégénéré. L’excuse de la banderole des Ultras qu’il fallait enlever est risible : celle-ci a déjà fait le tour d’Europe sans créer ne serait-ce que l’ombre d’un problème et ne comporte que le nom de l’association et une tête de mort rigolote, emblème de cette dernière. Le public madrilène n’a pas été en reste : non content de démontrer toute leur connerie en traitant les joueurs de couleur marseillais d’une multitude d’insultes racistes, certains énergumènes s’en sont également pris aux supporters handicapés de l’OM sur lesquels ils ont lancé des canettes. Enfin, l’entraîneur Javier Aguirre a pris un malin plaisir à traiter avec acharnement Mathieu Valbuena de « fils de pute » alors même qu’il était à terre. En conséquence, on se dit que ceux qui tenteraient de trouver des excuses à ces protagonistes pourraient allègrement être pris pour des fous, et pourtant…

Presse madrilène et politiciens espagnols perdent la tête

La sanction a été unanimement condamnée dès son annonce par les média de Madrid. Plutôt que de s’interroger sur les éventuels problèmes récurrents qui gangrènent leur football, ceux-ci ont dès lors choisis de se poser en victimes et proprement tenté de manipuler l’opinion publique. Le quotidien El Mundo évoque la présence d’un symbole nazi sur la banderole des Ultras, évidemment inexistant, dévoilant pour l’occasion sa méconnaissance la plus totale de l’esprit olympien. Marca dénonce un complot dont l’instigateur serait Michel Platini en personne et déclare qu’il les a « encore roulé, 24 ans après Arconada ». El Pais émet l’hypothèse d’un axe franco-anglais visant à détruire le football espagnol. Enfin la chaîne TVE-1 considère que les « sauvages supporters de Marseille ont éclaboussé la Police espagnole » par leurs agissements. Par ailleurs, les télévisions diffusent en boucle des fragments de vidéos bien choisis des incidents montrant les phocéens mettre la police, qui venait de les agresser, hors de leur tribune, juste avant que Pape Diouf et José Anigo n’interviennent. Déjà peu réputée pour son objectivité, la presse ibérique touche le fond. Malgré toute notre bonne volonté, il est difficile de donner une explication à tant de mauvaise foi. Les politiciens espagnols ne restent également pas inactifs. A l’instar de plusieurs de ses ministres, dont les activités ne touchent pourtant ni de près ni de loin au football, José Luis Rodriguez Zapatero fait part de son soutien « à la mort » à l’Atletico et à la police madrilène devant ce qui est qualifié par tous comme une « injustice ».

Le club de l’Atletico se positionne en martyr
Fort de tous les appuis dont il bénéficie, l’Atletico Madrid se prépare à faire appel. Son président serait entrain de constituer un dossier mettant en lumière la violence des « supporters radicaux olympiens ». Cherchant toutes les possibilités qu’il a de faire annuler cette décision, le club madrilène expose des arguments totalement invraisemblables. En conséquence, selon les thèses avancées, la chronologie des évènements de la soirée en arrive même à être modifiée : les Marseillais auraient donc provoqué les forces de l’ordre en leur jetant des sièges et ce serait ensuite que celle-ci serait intervenue, les supporters handicapés de l’OM se seraient levés à l’occasion du but marseillais ce qui aurait provoqué la colère des Madrilènes qui auraient ainsi jeté des canettes sur eux, trois jours avant le match la police espagnole aurait arrêté des supporters sévillans s’apprêtant à fournir des armes aux Marseillais afin de mettre Madrid à feu et à sang, … Florent Simana-Pongolle, joueur de l’Atletico Madrid qui a disputé la rencontre, confie qu’il lui a été interdit par les dirigeants de s' »exprimer sur le sujet ». Bref, l’affaire est traitée avec puanteur du côté de la capitale espagnole. Les mensonges, la propagande et la censure sont-ils considérés par tout ce petit monde comme une bonne publicité pour le pays ? La possible candidature de Madrid aux JO 2016 est peut-être responsable de toutes ces réactions incroyables. Les dirigeants madrilènes, prévoyants, ont également mis en garde leurs supporters concernant un éventuel déplacement à Marseille lors du match retour.

Un otage nommé Santos
Embarqué par des policiers avides de casser du Marseillais le soir du match, Santos Mirasierra est toujours en prison à Madrid, quinze jours après les faits. Non content d’être au coeur de la mêlée lorsque les policiers madrilènes ont chargé, le capo des Ultras aurait aussi subi des violences après son arrestation. Par ailleurs, le juge qui doit statuer sur son sort n’a de cesse de reporter sa décision alors que les vidéos de surveillance du stade disculperaient purement et simplement le Phocéen. Marca reprenait hier une déclaration des autorités judiciaires expliquant qu’il ne quitterait pas la prison avant la fin de l’enquête. On peut ainsi considérer que le terme d' »otage » ne semble pas si éloigné de la situation. Santi bénéficie fort heureusement du soutien sans faille de groupes de supporters espagnols qui lui apporte une grande aide matérielle et judiciaire. Ces derniers n’ont pas hésité à organiser une manifestation afin de sensibiliser la population sur son sort lors du week-end dernier. En France, les média préfèrent faire la une sur les sifflets de la Marseillaise, et semblent bien peu préoccupés, en dehors des quotidiens provençaux, par son sort. Sollicitées, les chaînes de télévision se disent non intéressées par le sujet. Côté politique, Jean-Claude Gaudin, jusqu’ici totalement muet, commence à bouger et aurait sollicité l’aide de Francisco Villa, ambassadeur de l’Espagne en France. Malgré toutes les tentatives des Ultras et de Frédéric Vigouroux dans le but d’obtenir son aide, le gouvernement français ne semble toujours pas concerné par l’affaire. Espérons que les choses évoluent…

Le constat est bien triste : média madrilènes et politiques espagnols semblent défendre unanimement un club dont les supporters et les policiers ont fait preuve de comportements violents et racistes. Estimant de notre côté que de tels agissements ne sauraient jamais être suffisamment réprimandés, on reste sceptique sur les possibilités de rapprochement des deux partis. Attention cependant à ne pas faire l’amalgame, de nombreux espagnols ont manifesté leur soutien à Santos Mirasierra et cela semble, à la vue des circonstances, très courageux. La presse andalouse a notamment critiqué l’attitude des journalistes de la capitale ibérique. Terriblement las de toutes cette hideuse histoire, une simple requête nous brûle désormais les lèvres : libérez Santi !