Son incompétence n’ayant pas de limite, Robert Louis-Dreyfus a déclaré la guerre à la ville de Marseille. Remercié, Pape Diouf peut cependant se rassurer, le milliardaire aura cette fois-ci toutes les difficultés du monde à rattraper son erreur, tant la colère semble unanime sur le Vieux Port. Pourquoi tant de haine, se demanderont les non-initiés ? Une question à laquelle nous tentons de répondre aujourd’hui.
Pape, c’était la sécurité
A bien des niveaux, le mandat de président de Pape Diouf aura permis à l’OM de retrouver une stabilité qui nous échappait depuis des lustres. Le dialogue instauré avec les supporters permettait de prévenir tout risque de révolution, ce qui n’est donc plus le cas. Côté finances, le club s’était inscrit dans une relation d’autonomie financière, et Robert Louis-Dreyfus n’avait plus à débourser un centime. Enfin, le club progressait sportivement, année après année, au point de participer trois fois successivement à la Ligue des Champions, chose qui n’était plus arrivé depuis le départ de Bernard Tapie en 1995. On peut dès lors s’interroger sur le motif du mécontentement de Robert Louis-Dreyfus. La Provence évoque des raisons liées « au développement économique du club, à de nouvelles stratégies de communication avec, entre autres, la légalisation prochaine des paris en ligne, avec des sociétés dans lesquelles des proches de RLD sont actionnaires ». L’ancien agent de joueur se serait également fait des ennemis en voulant défendre son ami Julien Fournier face aux Parisiens. Dans tous les cas, Pape Diouf incarnait, sans feu ni flamme, une politique cohérente, qui permettait aux supporters d’envisager sereinement l’avenir.
220 millions, une addition d’échec
Si les médias se complaisent à rappeler que le grand argentier suisse a sauvé l’OM lors des graves crises du début de millénaire, les supporters sont bien loin d’avoir le même avis, malgré les 200 millions qu’il a investi. Effectivement, le milliardaire n’a pas tardé à comprendre que le club phocéen pouvait tenir le rôle d’une magnifique vitrine pour ses sociétés et ses business, lui permettant ainsi de rentabiliser cet investissement. En 2007, lors du procès des comptes, il montrait d’ailleurs son vrai visage, pour se défendre face au tribunal : « mon intérêt pour l’OM aurait été qu’Adidas paye le plus gros contrat possible au club. Cela aurait été un vrai abus de biens sociaux. Or, à l’époque, il était de 8 millions de francs par an. Et aujourd’hui, ce montant est de l’ordre de 5 millions d’euros. (…) Pour l’actuel sponsor maillot Neuf Telecom, c’est la même chose. Le montant payé est de moitié inférieur environ à celui des sponsors de Lyon et du Paris SG. Et l’OM a au moins la même notoriété. » Par ailleurs, l’argent qu’il a mis dans les caisses de l’OM n’a servi qu’à réparer ses bêtises inqualifiables de naïveté, et chacun en a conscience.
Les supporters du Bétis en modèle ?
Lassés par le fantasque président Manuel Ruiz de Lopera, les supporters du Betis Séville ont eu sa peau en manifestant massivement (on parle de 70 000 personnes) dans les rues de la capitale andalouse. Peut-être qu’il est là l’exemple à suivre par les supporters olympiens excédés par le règne du grand argentier suisse. Les groupes devront en tout cas taper fort pour indiquer un message clair à l’actionnaire principal : les Marseillais ne veulent plus de lui ! Hier sur l’antenne d’RMC, le vice-président des Yankees Michel Tonini souhaitait frapper dans le porte-monnaie du club, là où ça fait mal. Grève d’achat des maillots, manifestation du mécontentement dans et en dehors des stades, furie marseillaise pour faire fuir les sponsors, … Les pistes sont nombreuses et la politique de la terre brulée semble la seule issue possible pour dégager le maillon faible du club. Les choses sont en tout cas claires : l’OM n’a pas besoin de Dreyfus et les supporters semblent prêts à sacrifier une année sportive pour le faire dégager. Autant on pouvait se satisfaire de son silence ces derniers mois, autant ses hommes, sa stratégie et ses décisions apparaissent maintenant comme des agressions.
Quid de l’avenir du club ?
En ne se montrant pas solidaire du sort de Diouf, l’ancien capitaine de l’OM, Didier Deschamps, n’a pas joué dans l’élégance. Si son passé avec le club lui assure un énorme crédit auprès des supporters, il se tient pour le moment sur la corde raide. Apprendre qu’il aurait joué un rôle dans cette immonde mascarade serait une terrible déception mais cela ne semble pas crédible, puisqu’il a été recruté par Diouf et que RLD lui reproche justement de ne pas l’avoir consulté avant. La meilleure chose qu’il semble devoir faire pour ne pas vivre la crise à venir serait peut-être de quitter le club dès maintenant. Le mercato est quant à lui au point mort, les dossiers Lucho Gonzalez et Servet Cetin sont suspendus. On ne voit d’ailleurs pas comment des joueurs pourraient être séduits par une telle pagaille. La probable prochaine nomination d’Antoine Veyrat, car « Paris voulait un oeil permanent à La Commanderie » selon Thierry Muratelle, devrait attiser le feu. Alors que l’intersaison laissait entrevoir de réelles perspectives de titre pour l’an prochain, le château de carte s’écroule peu à peu. Les prochaines semaines, voire les prochains mois, s’annoncent terriblement sombres, un peu à l’image de ce qui s’était produit en 1999.
Espérons que Louis-Dreyfus optera pour la solution la plus favorable à l’OM, à savoir son départ rapide. La gravissime situation dans lequel il a plongé le club n’arrange évidemment pas son image. Il ne serait d’ailleurs pas étonnant qu’il soit devenu l’homme le plus détesté à Marseille, mais aussi peut-être sur la globalité du territoire français, cela ne le touche donc pas ?