Les pleurs du mal

Les forumeurs d’OMplanète ont pu lire dernièrement un éditorial à épisodes signé Seb, retraçant la chronologie d’un recrutement qualifié de  » lamentable « . A défaut d’être actuellement un mur en défense, l’OM est donc devenu un Mur des Lamentations. Il est vrai que ses résultats actuels en L1 justifieraient amplement cet irrépressible flux lacrymal : […]

Les forumeurs d’OMplanète ont pu lire dernièrement un éditorial à épisodes signé Seb, retraçant la chronologie d’un recrutement qualifié de  » lamentable « . A défaut d’être actuellement un mur en défense, l’OM est donc devenu un Mur des Lamentations. Il est vrai que ses résultats actuels en L1 justifieraient amplement cet irrépressible flux lacrymal : deux points, la dernière place du classement, aucune victoire (aucune victoire en championnat depuis mars…), il n’ y a dans ces résultats bruts (pour ne pas dire brutaux) aucune bonne raison d’arborer le sourire béat du ravi de la crèche, ou de se mettre à danser la polka en signe d’intense satisfaction. Jean Fernandez peut bien dire que cette dernière place est anecdotique, aux yeux de beaucoup de supporters elle ne l’est pas, car ils la voient pour ce qu’elle est, d’une certaine façon : infâmante. Et que ça plaise ou non, les faits rapportés par Seb dans son édito sont incontestables : la stabilité, que tout le monde souhaitait, en est restée au stade du voeu pieux, immédiatement bafoué en pratique par le staff de l’OM. Joueurs revendus à perte, joueurs bradés, joueurs achetés trop cher etc., la liste est longue des décisions pour le moins contestables. RLD et ses collaborateurs ne sont pas au dessus de toute critique, et d’une façon générale l’OM, on ne le sait hélas que trop bien, est géré d’une façon désastreuse, avec en particulier un actionnaire principal qui sait bien mal s’entourer.
Pour autant, sur un plan strictement sportif, l’OM 2005-2006 est-il voué à ce désastre que certains annoncent ? Le recrutement a-t-il été à ce point raté que l’effectif actuel ne présente plus aucune garantie ? La descente en L2 doit-elle être désormais le seul horizon visible des amoureux de l’OM ? Rien n’est moins sûr.

1. Le beau parcours en Intertoto, ça compte, ou pas ?
Les contempteurs systématiques et les spécialistes de la récidive dans le dénigrement pourront bien mégoter autant qu’ils le veulent : les éliminations de la Lazio et surtout de La Corogne constituent deux jolies performances. Et chacun a pu voir que dans des conditions extrêmes, dos au mur, l’OM était tout à fait capable de hausser son niveau de jeu, pour parvenir à produire parfois de très belles séquences de football. Certains joueurs nouvellement recrutés, dont on attendait qu’ils démontrent non seulement du talent mais aussi du caractère, n’ont pas déçu, Ribery et Oruma en particulier. Cet OM-là a su se gagner le soutien du Vélodrome, par sa hargne, sa persévérance, sa volonté de ne jamais renoncer. Un ensemble de qualités que nous désespérions de revoir incarnées sous le maillot olympien, tant l’année dernière avait été marquée par le « syndrome de la feignasse » (copyright Krovider 2005). Ces qualités-là, pour l’instant, ne se sont pas manifestées aussi clairement en championnat. Pour l’instant. Mais qui peut nier qu’elles sont là, bien présentes ? Aurait-t-on de bonnes raisons de regretter, par exemple, un Eduardo Costa qui remontait les ballons avec la vitesse, la hargne et l’enthousiasme d’un plagiste en tongs ?

2. Produire du jeu, ça compte, ou pas ?
En Intertoto comme en championnat, l’OM 2005-2006 montre un visage nouveau dans le domaine de la prise en charge du jeu. La saison dernière, même en janvier /février 2005 où l’OM version Troussier alignait les victoires, les Phocéens avaient les pires difficultés à prendre le jeu à leur compte. Changement de cap cette saison : Fernandez veut que cette équipe produise du jeu, et dans ses bons moments elle y parvient de façon assez convaincante. Les milieux de terrain et les attaquants se sont créés plus d’occasions franches de but en 2 mois que durant toute la saison dernière. Certes, ces occasions ne se sont pas toutes transformées en but, et c’est là une partie du problème actuel de l’OM. Reconnaissons tout de même que voir jouer l’OM de cette année n’a rien à voir avec l’ingestion saumâtre d’huile de ricin que représentait le spectacle offert par les olympiens de la saison dernière…

3. Un gros problème défensif, ça compte, hélas…
La défense de l’OM, actuellement, n’est pas au niveau. Taiwo est une bonne surprise du début de saison, mais Beye tarde à retrouver son jeu, Meïté n’est pas une assurance tous risques, Nakata n’est vraiment pas en confiance et son jeu s’en ressent, et surtout Dehu, sur qui tout le système reposait, est très en retrait de ses performances antérieures, en vitesse notamment. Quant à André Luis, impossible actuellement de se faire une idée précise de ce qu’il vaut. L’engagement de Cesar sera-t-il une réussite ? Ce joueur apparemment prometteur permettra-t-il à l’OM de retrouver son assise défensive ? Voilà bien un enjeu de taille, pour ne pas dire décisif, car si les carences défensives de l’OM ne sont pas réglées assez rapidement, si les problèmes de placement et de replacement ne sont pas résolus, l’OM perdra encore beaucoup de matches, à coup sûr. Le moins que l’on puisse dire c’est que Fernandez, si l’on en croit ses déclarations répétées, est parfaitement conscient du problème.

4. L’efficacité en attaque, ça compte aussi, deux fois hélas…
S’il est vrai que l’OM produit du jeu et se crée des occasions, il reste que les attaquants manquent encore trop souvent le dernier geste du tueur. Il faut ici évoquer le cas Niang. Certes l’ancien strasbourgeois n’a eu aucun mal à faire oublier Marlet : vitesse, abnégation dans le pressing, capacité à échapper au marquage des défenseurs et aux montées défensives adverses (combien de hors-jeu inexistants sifflés à tort? A-t-on fait le compte ?), des buts aussi, et des beaux…Mais aussi beaucoup de gâchis sur de vraies belles occasions franches et nettes. Niang peut apporter beaucoup plus à son équipe, mais là encore, le recrutement récent de Gimenez, dont la réputation est de ne pas avoir besoin de beaucoup d’occasions pour marquer, est un enjeu important : si sa complémentarité avec Niang est une réussite, l’attaque de l’OM sera à coup sûr redoutable et de nouveau redoutée…

5. Les coups du sort, ça compte aussi et ça coûte cher, trois fois hélas…
Soyons clair : il serait malhonnête d’attribuer le mauvais début de championnat de l’OM à des problèmes d’arbitrage (le vrai gros problème, c’est la défense !). Il s’agit simplement de constater que l’OM n’est pas spécialement gâté en ce début de saison : outre la grossière erreur d’appréciation qui permet aux Ajacciens de Courbis d’obtenir un pénalty pour égaliser, que dire des tackles et fauchages irréguliers non sifflés des défenseurs adverses pris de vitesse par Niang notamment, depuis la première journée? Là encore il serait intéressant de faire les comptes en toute objectivité. Il reste simplement à espérer que la roue tourne et que ces péripéties ne soient pas à sens unique…

D’avanies défensives en ironies du sort, d’avaries offensives en avarice arbitrale, les ingrédients qui permettront à l’OM d’entamer sa remontée coulent de source : régler au plus vite les problèmes de cohésion au sein du bloc défensif, tendre vers plus d’efficacité en améliorant le ratio occasions/buts, bénéficier du soupçon de réussite qui fuit les olympiens actuellement. Même si cet OM 2005-2006 a sans doute plus le profil d’une équipe de Coupe(s) que d’un groupe taillé pour une épreuve de longue haleine, il a objectivement les moyens de bien figurer en championnat aussi.
Actuellement les supporters ont mal, d’où leurs pleurs. Et pourtant l’écart n’est que d’une lettre avec les fleurs qu’ils ne demandent qu’à envoyer à leur équipe favorite. Qu’un océan de pleurs donne naissance à d’innombrables couronnes de fleurs, décernées à un OM vainqueur et conquérant : voilà qui rendrait justice au génial poète auquel cet édito doit son titre, en un calembour calamiteux. Et l’OM recevrait alors en partage ce qu’il y a de plus beau : de l’air.