Les recrues ont-elles apporté quelque chose ?

Au terme d’un exercice 2002-2003 réussi, personne n’est dupe du côté de la Commanderie: si la troupe à Perrin a fait mieux que remplir sa tâche, elle a aussi montré d’évidentes limites. Limites offensives tout d’abord, avec de grosses lacunes en terme de finition. Et, plus globalement, un manque flagrant de qualité de jeu, caractérisé […]

Au terme d’un exercice 2002-2003 réussi, personne n’est dupe du côté de la Commanderie: si la troupe à Perrin a fait mieux que remplir sa tâche, elle a aussi montré d’évidentes limites. Limites offensives tout d’abord, avec de grosses lacunes en terme de finition. Et, plus globalement, un manque flagrant de qualité de jeu, caractérisé par un déchet technique important et une absence désarmante de fantaisie et de créativité.
Si les joueurs n’ont pas démérité, on ne peut faire l’économie d’un constat cruel mais inévitable: toute la volonté du monde, et toutes les tactiques imaginables ne sauraient remplacer le talent. Ainsi, chacun s’accorde à dire que le groupe ne pourra franchir un cap que grâce à un recrutement ambitieux.

Comme prévu, un recrutement massif a été effectué, avec les arrivées de neuf joueurs. Trois attaquants (Drogba,MarletetMido ), trois milieux (Meriem ,N’DiayeetVachousek) et trois défenseurs (Beye ,Christanvalet Skacel) ont étoffé l’effectif phocéen de manière apparemment très homogène.
Toutefois, si on nous a d’abord prédit l’Invincible Armada, beaucoup aujourd’hui parlent de Bérézina: les recrues, à une ou deux exceptions près, s’avèrent décevantes, et les problèmes sont toujours les mêmes. Le recrutement serait un échec, les nouveaux n’auraient rien apporté.
Certes, le bataillon de renfort n’a à ce jour pas tenu toutes ses promesses: il ne s’agit pas des sept mercenaires, encore moins des douze salopards… Mais n’est-il pas trop tôt pour parler des neuf chèvres? Pour y voir plus clair, passons tout d’abord l’effectif en revue.

Revue d’effectif:

Quelques succès…

A tout seigneur tout honneur, commençons par LA satisfaction de ce début de saison, j’ai nommé le maître-artilleur Didier Drogba. Inutile de s’appesantir des heures sur son cas : l’OM a trouvé un grand buteur, et l’arène olympienne un héros. Il n’attend que des munitions pour tirer.
L’autre succès, moins évident cependant, consiste en l’acclimatation réussie du stratège Camel Meriem. Celui-ci, suivant les consignes du général Perrin, a opéré avec succès un repli stratégique qui l’a propulsé au rang d’organisateur du milieu de terrain. Son sens du jeu, ses qualités techniques évitent parfois à l’équipe de trop s’embourber dans les tranchées adverses. Mais s’il veut gagner ses galons de meneur, il devra prendre davantage d’emprise sur le jeu. Notons à sa décharge que les besognes défensives impliquées par son nouveau rôle ne doivent pas lui faciliter la tâche.

…des échecs…

Une question est entre toutes les lèvres des supporters olympiens: le talent de Stepan Vachouseka-t-il déserté? En effet, les promesses entrevues lors des premiers matches ont vite été atomisées par une rafale de gestes ratés, une salve de médiocrité, un matraquage de matches transparents. Alors, objecteur de conscience, le Slave? Ou au contraire manque de confiance? En tout cas, une chose est sûre: le Tchèque devra montrer davantage pour intégrer durablement notre légion étrangère.
Ladite légion n’est d’ailleurs pas gâtée en ce début de saison. Un autre Tchèque a lui aussi laissé sceptique plus d’un observateur: il s’agit du joueur de couloir Rudolf Skacel. Alors que l’on attendait de lui qu’il couvre les flancs, notre homme s’est le plus souvent essoufflé à jouer les brancardiers sur le côté gauche, se dispersant entre montées stériles et positionnements hasardeux. Certes, on le dit plus habile à placer des banderilles dans un registre plus offensif. Mais, en dehors de quelques boulets de canon bien ciblés, il a trop peu montré pour mériter autre chose que le banc de touche.
Enfin, on peut aussi parler d’échec à propos du Franco-Ivoirien Habib Beye. Au départ, tout semblait le désigner comme le grognard qui manquait à notre équipe: une vraie tête de méchant, des tacles de mercenaire affamé, un caractère que l’on dit bien trempé. Autant de bons défauts que ses performances sous l’uniforme marseillais n’ont guère laissé transparaître. Il a paru tour à tour emprunté, désinvolte, voire dépassé par les événements. Toutefois, au contraire de son frère d’armes du flanc gauche, il aura sans doute l’occasion de faire ses preuves dans la seconde partie de la campagne 2003-2004, quand il aura dit au revoir pour de bon à l’infirmerie.

…et beaucoup d’incertitudes.

Une infirmerie que vient d’ailleurs de quitter notre ex-Gueule CasséePhilippe Christanval. S’il est encore trop tôt pour se prononcer, notons que ses premières apparitions sous la tunique provençale sont très encourageantes: sa vision du jeu, ses qualités techniques et ses relances soignées sont marquées par le sceau du talent. Si ses vieilles blessures de guerre le laissent tranquille, son recrutement pourrait bien être le coup de génie de l’état-major marseillais.
Très différent est le cas de l’EgyptienMido . Ce dernier tarde à retrouver son rendement pharaonique d’un but tous les deux matches. Sa présence athlétique, ses nombreuses passes décisives et quelques gestes de classe laissent augurer un talent énorme; mais on attend tellement plus de sa part! Sans doute a-t-il besoin d’un déclic, d’un signe qui lui permettrait de donner sa pleine mesure. Peut-être pourra-t-il alors déclarer le djihad aux défenses adverses?
Bien que globalement positif, le bilan provisoire deSteve Marletest entaché de quelques incertitudes. Régulièrement appelé sous les drapeaux, on attendait du vétéran antillais qu’il fasse partager son expérience des grands affrontements aux jeunes pousses olympiennes. Or, de ce point de vue, le compte n’y est pas encore: discret, rarement décisif, il n’a pas pour l’instant un rendement digne de ses grandes qualités. La faute à un positionnement inadapté? On devra patienter jusqu’à son rétablissement dans quelques semaines avant d’en juger.
Enfin, la grande énigme de ce début de saison estSylvain N’Diaye. Alors que notre milieu défensif souffre d’un manque d’agressivité évident, le chien de guerre franco-sénégalais ronge son frein sur le banc. Dans ces conditions, difficile d’émettre un jugement. Signalons simplement que ses rares apparitions sur le terrain ont été plutôt satisfaisantes, et mériteraient d’être renouvelées plus fréquemment.

Un bilan contrasté et provisoire:

Au terme de cette revue d’effectif, on voit bien qu’il est impossible de répondre de façon univoque à la question initiale. Les réussites côtoient les échecs, les incertitudes sont plus nombreuses que les certitudes. Et surtout, nous ne sommes qu’en première partie de saison: ce bilan ne peut être que provisoire, et fera peut-être sourire dans six mois ou un an.

En effet, avant de crier au désastre, il faut, encore et toujours, rester lucide. Notre déception vient en grande partie de l’euphorie du début de saison: nous avons oublié qu’il ne s’agissait pas d’un recrutement de stars, mais d’un pari sur l’avenir. On peut reprocher au recrutement un excès de jeunisme: mais pouvait-il en être autrement avec les moyens qui sont les nôtres? L’alternative était simple: soit choisir du jeune prometteur, soit se contenter de joueurs confirmés mais limités. Le choix de la jeunesse était celui de l’ambition et du long terme: espérons simplement que nous ne tarderons pas trop à en récolter les fruits. Il faut également insister sur la difficulté à intégrer neuf joueurs, là où nos principaux concurrents n’ont eu que deux ou trois nouvelles têtes. Il était franchement illusoire de croire que tout serait rôdé en quelques mois.

Je conclurais en répétant qu’il nous faudra être patient avec les nouveaux, dont on a peut-être attendu trop, et trop vite. A ceux qui me rétorqueront que la patience a des limites, je demanderai: avez-vous une meilleure idée? En effet, il est facile de réclamer du changement, de nouvelles têtes. Mais ceux qui ont un peu de mémoire se souviendront qu’il y a quelques années cette politique a entraîné un énorme accroissement numérique de l’effectif olympien, avec des conséquences désastreuses: gestion humaine difficile, et surtout explosion de la masse salariale. La nécessité de réduire celle-ci nous a d’ailleurs placé en position de faiblesse sur le marché des transferts, en nous contraignant à brader des joueurs de talent. Si quelques renforts s’imposent au mercato, ils devront être limités quantitativement, et très ciblés. La seule chose à faire aujourd’hui est donc de laisser le temps à nos recrues de s’intégrer, et de peut-être donner dans un futur proche la pleine mesure de leur talent.