Le vent tourne… Après des débuts presque parfaits, Philippe Troussier a fini par connaître ce qu’aucun entraîneur ni aucune équipe ne saurait éviter au cours d’une saison : une mauvaise série. Cinq points en six matches, soit un rythme de reléguable qui a partiellement compromis la qualification en Ligue des Champions, laquelle semblait acquise il y a encore un mois. De laborieuse, la qualité du jeu de l’OM est devenue presque honteuse, et la réussite, qui permettait – comme à Bastia – de masquer nos indiscutables lacunes, a fui pour de bon les Olympiens : les ballons hasardeux ne finissent plus leur course dans les filets adverses, et ce sont désormais les penalties en notre faveur que l’homme en noir oublie de siffler.
Tension et nervosité…
Il n’en fallait pas plus pour raviver les tensions entraperçues lors de l’arrivée de Philippe Troussier. Brahim Hemdani, comme avant lui un certain surfeur basque depuis parti » comme un voleur » (@Elsa) du côté de la Bavière, se serait plaint des méthodes musclées du bonhomme… Faut-il pour autant le déplorer, s’en inquiéter ? Doit-on y voir les prémices d’un pourrissement de l’ambiance façon Perrin ? Nullement ! Outre le fait que Troussier ne semble pas adepte de la fellation en présence de mineurs, insistons sur les vertus du conflit : comme le » sorcier blanc » le rappelle lui-même à qui veut l’entendre, le haut niveau exige une mobilisation optimale, une certaine dose d’agressivité qui ne peut s’obtenir qu’en provoquant des réactions chez des joueurs dont la tendance naturelle est plutôt le relâchement. D’ailleurs, la meilleure période de l’OM cette année – celle ayant suivie l’arrivée de Troussier – ne correspond-elle pas au moment où les tensions internes furent les plus palpables ? Elle fut initiée par un match où Lizarazu, Pedretti et Luyindula furent écartés. L’OM s’était imposé 3-2 à Caen.
Un électrochoc nécessaire
Alors, en supposant que les mêmes causes doivent produire les mêmes effets, ne doit-on pas espérer voir dans cet OM-Ajaccio un nouveau Caen – OM ? Après la série d’excellents résultats qui nous a fait revenir – certes brièvement – à quelques unités de Lyon, nos joueurs ont quelque peu baissé leur garde, surestimant leur force. Car le changement apporté par Troussier se situe surtout au niveau de l’engagement et de la rigueur – les faiblesses techniques et créatives restant les mêmes, ces domaines constituant des impondérables auquel aucun entraîneur ne peut rien. Or, les buts et les victoires se succédant, les Marseillais auront peut-être été aveuglés, voyant du talent et de la facilité là où il n’y avait que volonté et réussite. Un constat erroné, qui aura amoindri leur volonté, justement, sans pour autant accroître leur talent… D’où la grande visibilité actuelle de leurs lacunes, lesquelles étaient auparavant dissimulées par leurs valeurs collectives. Qu’on se le dise : aujourd’hui comme il y a deux mois, l’OM manque cruellement de grands techniciens – puissent nos dirigeants s’en souvenir en cas de qualification en Ligue des Champions… Mais en attendant le mercato, il faudra faire avec les moyens du bord : il sera donc impératif ce soir de renouer avec l’état d’esprit volontaire qui était le leur il y a encore quelques semaines.
Un match couperet
Car la partie est loin d’être gagnée d’avance. Les chiffres sont parfois trompeurs, et le classement des Corses est loin de refléter leur niveau de jeu actuel – semblable remarque est par ailleurs valable pour leurs hôtes… Les pensionnaires du » stade » François Coty possèdent des techniciens capables de rendre jaloux plus d’un milieu offensif marseillais… Les Brésiliens André Luiz, Edson ou Lucas ont fait d’Ajaccio une équipe offensivement percutante, et le millieu Johan Demont suscite la convoitise des plus grands clubs français. Les probantes victoires face à Auxerre et Monaco, qui sont revenues de l’île de Beauté avec respectivement quatre et trois buts dans leur escarcelle, auront valeur d’avertissement pour nos larrons. Des succès auxquels n’est sans doute pas étranger Roland Courbis, le pagnolesque entraîneur ajaccien. Plus qu’une simple figure folklorique, il s’agit assurément d’un bon entraîneur : on ne tient pas 29 mois à la tête de l’OM avec des boutades et des bons mots.
Reste que l’OM, pour renouer avec les joies de la Ligue des Champions n’aura d’autre choix que de s’imposer. Tout autre résultat serait inacceptable, et fatal aux ambitions de l’OM : Ajaccio, même en forme, reste une équipe modeste, et on ne voit pas comment notre équipe pourrait finir dans le trio de tête sans être capable d’en venir à bout – surtout quand on connaît les prochains adversaires de l’OM. Marseille, heureusement, se présentera ce soir dans de bonnes conditions : le rassurant Frédéric Déhu fera sa rentrée, et seul le transparent Battlès manquera à l’appel. Philippe Troussier devrait en outre renouer avec son 3-5-2 traditionnel, celui qui avait permis de relancer l’OM il y a quelques mois. Quant à Hemdani, il profitera de son écartement du groupe pour se réimprégner des valeurs de discipline collective et de professionnalisme – à l’image, on l’espère, de ses coéquipiers.