En quelques semaines, le centre Robert Louis-Dreyfus s’est un peu plus coloré en ciel et blanc, adoptant l’accent castillan rioplatense, cet espagnol aux sonorités Italiennes qu’on ne trouve qu’en Argentine et Uruguay. De premier abord, Marcelo Bielsa ne paye pas de mine avec son embonpoint et son goût prononcé pour les joggings Adidas. D’autant plus que comme tous les ans le design de l’équipement olympien est loin de faire l’unanimité. Néanmoins, les joueurs phocéens n’ont pas mis longtemps à comprendre qu’ils avaient affaire à un entraîneur atypique, minutieux et perfectionniste, qui ne tolèrerait en aucun cas une demi-implication de leur part. Et comme de bien entendu, les changements qui résultent de son arrivée ne plaisent pas à tout le monde.
Une génération qui a mauvaise réputation
Altérés par un système leur attribuant tous les droits, la plupart des footballeurs de Ligue 1 perdent toute envie de mouiller le maillot lors des exercices quotidiens dès le premier chèque à cinq chiffres encaissé. Ils ne paraissent alors plus trouver d’énergie que pour aller écumer les pistes de danse des discothèques aixoises ou coïter avec les michetonneuses du coin. Drogués aux émissions de télévision de Cyril Hanouna ou Benjamin Castaldi, et confortés par un entourage qui n’a souvent d’yeux que pour leurs biftons, grand nombre d’entre eux adhèrent à l’adage de Jacques Séguéla sur les quinquagénaires et au culte du corps façon Cristiano Ronaldo : « sois beau et, surtout, tais-toi ». En outre, il y a fort à parier qu’aucun n’ait jamais entendu parler de Joseph Mascarel ou Adolphe Thiers. Pour autant, ne nous moquons pas trop car ils ne sont pas si différents de nos gamins, voire de nous-mêmes. Comment aurions-nous réagi face à un compte en banque plein à craquer à l’âge de 20 ans ? Et puis, après tout, il existe quelques exceptions, quelques footballeurs qui savent lire, écrire et qui sortent des clivages. La plupart d’entre eux ont simplement besoin de modèles sains et d’un brin d’éducation pour adhérer à un mode et une hygiène de vie adaptés à leur métier.
La méthode Bielsa pour faire grandir le club
Il y a quelques jours, certains journalistes paraissaient s’offusquer de voir ces bellâtres mouiller le maillot à l’entraînement. Sous couvert d’anonymat, l’agent d’un phocéen aurait même dénoncé des séances trop éreintantes. Effectivement, quoi de plus anormal pour un sportif que de parfaire sa condition physique, sa technique et ses connaissances tactiques ? De même, pourquoi faudrait-il autant travailler en Ligue 1 que dans les autres championnats ? Une attitude écoeurante, inqualifiable de culot et d’hypocrisie. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir prévenu tous les réfractaires à l’effort que les moeurs allaient changer à partir de juillet du côté de la Commanderie. S’il y a peu de chance pour que l’on apprenne quel est l’auteur de cette courageuse intervention médiatique, on souhaite avant tout que son joueur aille se toucher la nouille ailleurs. Car si la sueur et l’humilité sont de mise dans les centres d’entraînement de Madrid, de Barcelone, de Manchester ou de Milan, il ne peut en être autrement à Marseille. Aussi, pour éviter la rébellion de certains champions estampillés Ligue 1 au palmarès long comme le pouce, il serait judicieux pour Marcelo Bielsa de s’entourer de quelques meneurs qui ne rechigneraient pas à la tâche et sauraient tirer l’effectif vers le haut. Nous n’avons que trop payé, la saison dernière, l’absence de leaders charismatiques.
Comme un autre Argentin récemment passé par le club (Gabriel Heinze), l’ancien sélectionneur du Chili se passerait volontiers des relations avec les journalistes. Et quand les médias barcelonais soutiennent leur club envers et contre tout, quelques-uns de ceux spécialisés dans l’OM semblent davantage se soucier de leurs propres intérêts. La grande majorité des fans ayant décidé de donner toute leur confiance en la légende sud-américaine, les partisans de la méthode relax ne devraient pas grandement se faire entendre dans l’immédiat. Mais compte tenu des mois nécessaires pour voir les résultats du travail de l’ancien coach de l’Athletic Bilbao, espérons que les vindicatifs ne saperont pas la patience de certains fans et, par la même occasion, ne contamineront pas le vestiaire marseillais. S’il ne peut pas se payer les stars du football mondial, l’OM ne peut redevenir une place forte du football européen qu’en retrouvant ses valeurs d’antan, et notamment la solidarité, l’engagement et la générosité. L’Atletico Madrid de Diego Simeone, élève du maitre Marcelo Bielsa, a montré la voie.