Voilà un dimanche soir depuis longtemps bloqué dans les chaumières de France et de Navarre. Chocs majeurs de la Ligue 1 depuis le début des années 90, les OM – PSG ont relégué au rang d’antiquité les sommets d’antan : les OM – Bordeaux et autres OM – St Etienne exhalent encore un parfum de nostalgie, mais plus guère de souffre.
A la différence de ceux-ci, les OM – PSG sont d’abord des chocs médiatiques. En effet, si l’un et l’autre des deux clubs se posent parmi les favoris du championnat à l’entame de chaque saison, ils n’arrivent que très rarement à enchaîner deux éditions convenables, et ne le font pratiquement jamais en même temps…
Voilà donc un choc bien symptomatique des évolutions du football, de moins en moins sport et de plus en plus spectacle… Mais, au fond, qui se plaindra de voir son dimanche soir pimenté d’un soupçon d’adrénaline ?
Une rivalité fantasmée…
Car de l’adrénaline, il y en aura forcément. Que la rivalité qui oppose les deux clubs soit artificielle ne changera rien à l’affaire : tout le monde sait désormais – ou fait semblant de ne pas savoir – qu’il s’agissait à l’origine d’un vaste coup marketing. Rien en effet ne prédispose Parisiens et Marseillais à se vouer une haine mutuelle, pas même la légende noire du jacobinisme parisien que certains se complaisent à évoquer – à défaut de l’étayer…
Au contraire, ces deux clubs se ressemblent comme deux gouttes d’eau : ce sont les plus médiatiques et les plus populaires de France ; ils sont les seuls à s’être imposés sur la scène européenne ; ils partagent une histoire chaotique faites de hauts et de bas – sans parler des très nombreux joueurs ayant connu les deux clubs. Et surtout, ils partagent les mêmes intérêts, qu’il s’agisse des droits TV ou encore de l’injustice qui leur est faite par la fiscalité monégasque : on ne s’étonnera guère que les relations entre l’OM et le PSG soient cordiales, depuis l’ère Denisot – Tapie jusqu’à nos jours.
…devenue réalité.
Mais de tout cela les fanatiques des deux camps n’ont cure : cette rivalité se nourrissant d’elle-même, elle est très rapidement passée de la représentation à la réalité – comme quoi l’esprit humain est fort malléable. Certains épisodes fâcheux ont largement contribué à cette évolution : les petites phrases d’avant match, les échanges de bourre-pifs ou encore les vraies-fausses erreurs d’arbitrage ont nourri chez eux une rancoeur tenace. Un peu à l’image des vendettas corses, on ne sait plus qui a commencé, ni pourquoi, mais à vrai dire on s’en tamponne pas mal…
Fin de série ?
On comprend donc la frustration des supporters olympiens face à la série de huit déculottées que leur club vient de subir. Une série qui ne fait que donner plus de consistance à la rivalité OM – PSG. Huit défaites de rang, soit une série assez invraisemblable en football – tant et si bien que l’on peut se demander s’il ne s’agit pas d’un cruel retour de bâton pour ceux qui n’ont eu de cesse ces dernières années de mettre de l’huile sur le feu. En effet, à force de donner tellement d’importance à ce match, ceux-ci ont finalement atteint leur objectif : faire définitivement passer ce match au-delà de la normalité. Mais ce faisant, n’ont-ils pas agi au détriment des intérêts de leur club ? En effet, en imposant aux Marseillais une pression sans doute supérieure à celle que subissent les Parisiens, n’ont-ils pas créé eux-mêmes les conditions d’un blocage psychologique des Marseillais, lequel profite depuis huit matches aux Parisiens ? Une pression hors-normes que seuls pouvaient supporter les tauliers du début des années 90, protégés qu’ils étaient par le paratonnerre Tapie.
Un OM logiquement favori
Reste que, si l’on s’en tient à la logique, l’OM devrait s’imposer ce soir. Même s’ils ne sont pas au mieux actuellement, les Marseillais restent de solides deuxièmes du championnat, loin derrière Lyon, mais définitivement hors de portée de leur adversaire du soir. Si Laurent Fournier a redonné un semblant de vie à l’équipe laissée pour morte par Coach Vahid, le club de la Capitale ne décolle pas pour autant de la seconde partie du tableau, loin – très loin – des objectifs initiaux.
Quant à l’OM, même s’il sort d’une défaite face à Monaco, il n’est pas lieu de désespérer à son sujet. Le club phocéen enregistre le retour du désormais précieux Steve Marlet, et devrait donc être capable de développer un jeu offensif plus ambitieux, grâce à la profondeur et aux appels de l’ex tête de Turc du Vél’.
Seul point noir – mais de taille : l’absence du patron de la défense, Frédéric Déhu. Gageons toutefois qu’avec des joueurs comme Beye ou Méité à sa disposition, Philippe Troussier saura trouver la solution.
Des enjeux lourds de conséquence
Mais au-delà de la rivalité et du folklore, il convient de rappeler que ce match sera l’objet d’enjeux aussi concrets qu’importants :
– après la défaite de Monaco, il s’agit pour l’OM d’une belle occasion de consolider sa deuxième place, et de s’ouvrir en grand les portes d’une qualification directe en Ligue des Champions ;
– et, de l’aveu même de Philippe Troussier, le résultat de ce soir pourrait déterminer en partie son choix de prolonger ou non son expérience olympienne.
Voilà un enjeu qui devrait inciter les supporters olympiens à supporter franchement leur équipe ce soir, et ce jusqu’au bout. Le redressement olympien n’est pas dû au hasard : prions pour que, quel que soit le résultat de ce soir, la déraison ne vienne pas entraver les plans d’un homme compétent, comme on en a vu si peu ces derniers temps à la tête de l’OM…