S’il n’est pas rare de voir un directeur sportif défendre un de ses joueurs, la sortie de José Anigo est symptomatique du climat de crispation qui entoure le sort de Ben Arfa actuellement. Relégué sur le banc de touche par un Gerets qui souhaite économiser son joueur tant moralement que pour ses problèmes persistants aux adducteurs, l’ancien Lyonnais pourra -t-il s’imposer lors de la seconde partie de saison ?
Un potentiel énorme
« J’avais soutenu Ziani l’an passé car je croyais en lui. Je ne m’étais pas trompé. Je suis dans la même optique avec Hatem. Il a trop de talent pour passer à côté d’une grande carrière » lance José Anigo excédé par les critiques dont son joueur fait l’objet. Et l’ancien coach marseillais ne s’avance pas trop en disant cela tant le joueur a été parfois brillant lors de certains matchs en début de saison. A la finition mais surtout à la baguette, Ben Arfa est un « génie » dès qu’il simplifie son jeu. Et s’il a su très souvent le faire en début de saison, il a été moins inspiré lors des dernières rencontres de l’année 2008.
Un jeu fait pour Marseille
Pour tout Marseillais qui a étrenné ses crampons sur les stabilisés des Aygalades à Montredon, de Sainte-Marthe à Beaumont, il existe deux constantes dans le jeu pratiqué (et donc apprécié) des Phocéens : technique, et rudesse des contacts. Et si l’international français n’est pas un briseur de tibia, il peut être parfois un enchanteur de stade, l’un de ces joueurs capables d’éclabousser une rencontre de sa classe. Mais plus que sa capacité à éliminer n’importe quel défenseur avec une facilité déconcertante, c’est sa faculté à distribuer le jeu qui frappe les esprits. Ben Arfa est un grand passeur. Reste à le mettre dans les dispositions qui lui conviennent : une liberté totale dans l’axe du terrain derrière les attaquants. Mais constant dans son inconstance, le joueur est pour autant sujet à des absences qui l’écartent du rang auquel il pourrait prétendre.
Un caractère complexe
« Comme tous les gens qui ont du génie, il est un peu différent. Il faut accepter cette différence et faire en sorte qu’elle soit bénéfique pour le groupe. » Et si son attitude enfantine lors de la rencontre face au PSG tient plus de l’immaturité que d’un manque de respect, il faut avouer que sa mise sur la touche ce jour-là reste une énigme (et une erreur). Pour le reste, celui qu’on nous présentait comme un garçon ingérable s’avère être pour le moment un joueur comme les autres comme en attestent les propos du directeur sportif marseillais. « Il n’est pas emmerdant, vit bien avec tout le monde mais il est dans son monde. » Mérite-t-il pour autant le lynchage médiatique dont il a été l’objet ? Certainement pas.
La maturité comme alibi
Considéré comme le plus précoce de la génération des Nasri, Benzema ou Menez, l’ancien pensionnaire de Clairefontaine peine-t-il réellement à confirmer l’or que l’on reconnaît dans ses pieds ? Certainement. Mais le juger dès les premiers mois, n’est-ce pas en réalité un pitoyable aveu d’ignorance ? José Anigo se veut en tout cas rassurant. « Il n’a que vingt et un ans et il ne faut pas le perdre de vue. Certains ont le talent et la maturité, lui a le talent mais la maturité met un peu plus de temps à venir, contrairement à un Nasri par exemple ». Sauf que Ben Arfa n’évolue pas dans le cocon de son club de toujours et a tout de même des statistiques qui feraient pâlir le meilleur des Nasri avec 6 buts et 6 passes décisives lors de la première moitié de saison.
Objectif critique
S’il en est un qui est symbolique d’une certaine presse et d’un certain milieu du football qui n’aime pas Ben Arfa, c’est bien Jean-Michel Larqué. Ancien grand joueur de Saint-Etienne et médiocre parmi les médiocres en équipe de France, le commentateur sportif en a fait l’une de ses cibles préférées ! Et s’il est plus conciliant avec certains médiocres, l’ancien alter-ego de Thierry Roland l’a dans le nez. Au point de sortir de » son » match pour y aller de son sempiternel refrain sur le talent gâché du jeune homme et son appétence à » compliquer le jeu » ou à » déjouer » ! » Pour moi, ce n’est pas un bon footballeur, ce n’est même pas un bon footballeur en devenir. Il a trop de manques. Il n’a aucune intelligence de jeu : quand il faut donner le ballon, il ne le donne pas, quand il ne faut pas le donner, il le donne… Il appréhende les évènements à l’envers avant le match. » Si Larqué avait eu l’once du talent de Ben Arfa, il s’en serait pourtant bien contenté.
Car sont-ils nombreux ceux qui regrettent d’avoir lâché Nasri pour avoir obtenu Ben Arfa ? On a longtemps reproché aux dirigeants de l’OM de vendre les bijoux de famille sans assurer leurs arrières en recrutant un remplaçant de valeur. Or force est de constater que le départ de Nasri n’a pas laissé un vide abyssal avec l’arrivée de Ben Arfa. Laissons-lui donc le temps de s’adapter, de se faire sa place pour éclater à la face de ceux qui le critiquent aujourd’hui. Nous sommes nombreux à croire énormément dans ce jeu (j’en fais partie) et Ben Arfa a besoin de notre soutien.