Quand la télé dirige le football français

Depuis 1984, Canal plus a été le partenaire privilégié du football français. Sous la houlette de Charles Bietry en particulier, les modes de retransmissions ont été bouleversés avec des images inédites (celles dans les vestiaires, la loupe, le nombre de caméras retransmettant le match, etc …) rendant celles de TF1 d’une pauvreté affligeante. Fort d’un […]

Depuis 1984, Canal plus a été le partenaire privilégié du football français. Sous la houlette de Charles Bietry en particulier, les modes de retransmissions ont été bouleversés avec des images inédites (celles dans les vestiaires, la loupe, le nombre de caméras retransmettant le match, etc …) rendant celles de TF1 d’une pauvreté affligeante. Fort d’un succès amplement mérité, l’entreprise de Dédé Rousselet a revu ses ambitions à la hausse passant d’une artisanale impertinence à une logique bien plus industrielle.

L’OM produit d’appel et bonne poire
Avec l’arrivée de « l’homme à la Wonder dans le dos » à la tête de l’Olympique de Marseille, la chaîne cryptée a trouvé le bon client pour tirer le championnat de sa torpeur. Après la chute du charismatique Roger Rocher, voici le temps des Claude Bez et Bernard Tapie. La gouaille, les tacles à la gorge et des stades débordant de haine, c’est toujours plus vendeur qu’un tiercé à Chantilly. Des clients comme çà, on les soigne, on les caline. Bordeaux et Marseille ont vampirisé le football français des années 80. Puis le PSG est rentré dans la donne.

Achat du PSG ou comment être juge et partie
Canal + a été fondé en partie en réaction aux accointances des médias avec le pouvoir. L’insolence dont ont fait preuve durant des années les journalistes de la chaîne a fait sa marque de fabrique et son succès. Dès lors comment rester crédible lorsqu’on est actionnaire principal d’un club français (depuis 1990) et diffuseur des images du championnat français ? La chaîne « bobo » a choisi une pirouette : égratigner régulièrement l’équipe (avec les Guignols de l’info) pour faire passer la pilule. Un verre d’eau monsieur l’abonné ? Non merci j’ai déjà préparé la vaseline !

C+, cellule de recrutement pour le PSG
De chef du service des sports, on devient président du club, de commentateur à entraîneur. Les exemples sont légion (Denisot, Bietry, Leroy, j’en passe et des pires). Des passerelles entre les deux entités qui ressemblent plus à des autoroutes. Difficile après çà de rester objectif. Contrarier sa nature, elle revient au galop. Les commentaires sont donc aujourd’hui quasiment ouvertement anti-phocéen tout en offrant, pragmatisme économique oblige, au public ce qu’il demande : des matches de l’OM (cf. le nombre de retransmissions).

Ne jamais mentir mais contourner la vérité
Exemple évident du camouflage de la vérité pour protéger le bébé : le racisme dans les stades. Le PSG est à l’évidence un des rares clubs qui y soit confronté de façon massive et organisé. Omerta dans les rangs de Canal.  » C’est un problème préoccupant pour tous les clubs français « , telle est la version officielle. La Ligue, comme un petit toutou bien sage, suit les recommandations et invitent les grands clubs français à une table ronde. Les dirigeants phocéens acceptent d’y aller faisant de nous des coupables alors qu’il n’y a plus eu d’actes racistes dans le stade Vélodrome depuis 15 ans (bananes à Boli). A chaque retransmission, son lot d’humiliations suffisamment dissimulées pour nous faire passer en plus pour des paranoïaques.

Retransmettre à tout prix
Outre des journées de championnat s’étalant sur 3 jours (vendredi, samedi et dimanche) et qui ont pour conséquence de briser le timing de récupération des équipes, deux exemples cette semaine illustrent l’omnipotence du diffuseur sur la tenue du championnat : Caen-OL (TPS et Canal Sat en ppv) et St Etienne-OM (C+). Conditions climatiques exécrables et pelouse impraticable n’ont pas suffi à annuler le match. L’abonné décide et l’arbitre exécute. Rien d’officiel bien sur mais la pression est évidente. La chaine a payé et doit rentrer dans ses sous. Au cas où l’OM vient à mener au score, que fait-on ? On arrête le match à la 58ème minute (OM-Auxerre mars 2002) pour le faire rejouer plus tard ! Bonjour la paranoïa, me direz-vous mais les faits ont la peau dure. Remarquez que les commentateurs de Canal+ se sont félicités de la docilité des dirigeants marseillais qui n’ont pas fait venir un huissier pour constater l’état de la pelouse, comme l’a fait le président Aulas. Edifiant. A noter qu’Auxerre-Toulouse, qui ne devait pas être retransmis, a été annulé la semaine dernière !

Pieds et poings liés, le football français prend ses ordres Quai André Citroën. Avec les 600 millions d’euros que la chaîne va payer par an pour retransmettre des Caen-Troyes, ça ne fait que commencer. En tant que supporter et consommateur, notre marge de manoeuvre est réduite à sa plus simple expression : couper le son.