Un » classico » à la française. Un match mythique. Bien avant la rivalité artificielle et concertée entre l’OM et Paris, lorsque la seule logique sportive – et non pas la quête de l’audimat – présidait à la définition d’un choc footballistique, un OM – St-Etienne était certainement l’Everest sportif et émotionnel d’une saison. Aujourd’hui, la donne a sensiblement changé : l’ASSE vient à peine de s’échapper du bourbier de la L2, tandis que l’OM est à la recherche d’un titre national depuis treize ans… Mais qu’importe : il reste de ces années fastes un parfum de légende, une passion ardente qui transforme en affiche ce qui n’aurait dû être qu’un match parmi tant d’autres.
Un choc d’arrière-garde ?
Est-ce à dire pour autant que ce match est un choc pour nostalgiques, une affiche poussiéreuse à la gloire d’un temps révolu et mythifié ? Cela aurait sans doute été vrai si l’OM n’était pas en position de se rapprocher de l’ogre lyonnais, et de consolider sérieusement une seconde place encore chimérique avant l’arrivée de Troussier. Les défaites de l’OL, d’Auxerre, de Sochaux et de Lille, ainsi que le piètre nul concédé par les Monégasques face à Metz, peuvent permettre à l’OM, en cas de victoire, de réaliser une excellente opération. En effet, de tous les rivaux de l’OM, aucun ne s’est imposé. Hasard, simple coïncidence ? Certes pas : le point commun de toutes ces équipes est d’avoir joué en coupe d’Europe – et en coupe de France pour certaines. Comme prévu, le calendrier allégé de l’OM joue en faveur du club phocéen, et lui permet de renouer avec les plus hautes espérances.
Des Verts et des pas mûrs…
L’enjeu du match justifie donc à lui seul l’importance qui lui est accordée. Mais pour parler de choc, il faut aussi une opposition valable : les Verts seront-ils en mesure de remplir ce rôle ? Difficile à dire. Même si le club du Forez se maintient honorablement en milieu de tableau, les hommes d’Elie Baup n’ont remporté qu’un seul match en 2005 : il faudra encore du temps et de la patience pour voir cette équipe atteindre la maturité nécessaire à son retour au premier plan. Mais sur un match, les Verts pourront compter, en outre de leurs capacités intrinsèques, sur la motivation particulière qui ne peut qu’accompagner une telle affiche, poussés qu’ils seront par un public survolté. Et si l’ambiance particulière qui entourera ce match ne suffisait pas à les transcender, la frustration et l’esprit de vengeance liés au match aller devraient – le temps d’une soirée – transformer cette équipe douée mais fragile en adversaire redoutable.
Istres, un simple accident ?
L’OM devra donc, pour espérer recoller aux basques du leader lyonnais, afficher une autre qualité de jeu que lors de ses dernières sorties. Face à Bastia et à Istres, l’OM eut le plus grand mal à produire du jeu et à se procurer des occasions. Si la base défensive reste solide, l’animation offensive pose problème : un système avec deux milieux offensifs excentrés requiert des joueurs capables de déborder et de centrer. Or, les deux seuls véritables spécialistes ne sont pas opérationnels : Cheyrou semble replongé dans ses affres du début de saison, tandis que Fiorèse est une fois de plus blessé – ce n’est décidément pas son année… Quant à Battles et Nasri, s’ils sont capables de remplir ce rôle, ils ne s’expriment pleinement que dans une position axiale, et ont une fâcheuse tendance à repiquer vers le centre quand ils sont alignés sur les côtés.
Des réajustements nécessaires
Face à ce constat, quelques modifications s’imposent. Un retour au 3-5-2 devrait marquer cette rencontre, ce qui aurait le double avantage de résoudre le problème offensif précité, et de favoriser l’intégration du désormais ex sans-papiers Koji Nakata. Sa situation fraîchement régularisée, l’idole des collégiennes nippones aura tout le loisir de montrer sa valeur en remplaçant Salomon Olembé, suspendu. Comme l’a fait remarquer Philippe Troussier, il s’agira pour lui d’un véritable » baptême du feu « , avec une ambiance inconnue au Japon, où le football, sport familial à l’esprit bon enfant, ne saurait générer des scènes de type guérilla urbaine, comme on l’observe dans le reste du monde…
L’invité surprise…
Un autre paramètre, moins attendu mais au moins aussi important, devra également être dominé par le défenseur asiatique – et par l’ensemble du groupe marseillais : les conditions climatiques. La neige tombe sans relâche sur le chaudron depuis quelques jours, et si la rencontre aura lieu, son issue n’en sera pas moins déterminée par la capacité des deux équipes à composer avec ces contraignantes conditions climatiques. S’il l’on venait à douter de leur influence, que l’on songe à l’OL, incapable de développer son jeu sur le terrain gelé de Caen, ou encore à Lille, qui a encaissé deux de ses trois buts à Bastia à cause du vent et des folles trajectoires qu’il imprime au ballon. Les conditions climatiques seront donc un handicap ; mais un handicap maîtrisé devient un avantage relatif par rapport à qui le subit passivement. Les trois points ne pourront ainsi être obtenus qu’en remportant deux combats : un contre les hommes, et l’autre… contre les éléments.