Après l’éviction rocambolesque de Pape Diouf en 2009 ou le départ conflictuel de Didier Deschamps en 2012, la trêve estivale 2014 réserve une autre belle intrigue digne des Dallas de la grande époque. Cette propension à placer des scandales à la une des médias en mettant en péril l’équilibre du club n’a pas d’équivalent en France, même si le RC Lens s’y essaie depuis quelques semaines. Cette fois-ci, l’imbroglio se situe autour du nouveau Stade Vélodrome, lequel sera bientôt achevé. Un accord pour le loyer annuel paraissait proche, après deux semaines de négociations, mais Jean-Claude Gaudin a semble-t-il fait volte-face et les hostilités ont commencé.
La rouscaille par presse interposée
Désormais prisonnière d’un partenariat public-privé dont la logique nous échappe, la Mairie demande une redevance annuelle d’environ 8 millions d’euros au club pour l’utilisation de l’enceinte. Une somme qui parait trop importante pour ses finances. Plusieurs centaines de millions d’euros sont donc en jeu sur les trente ans à venir et les négociations prennent depuis quelques jours une dimension assez extravagante, chacune des deux parties usant des plus terribles stratagèmes pour déstabiliser son adversaire. Ainsi, quand l’OM dépose des référés auprès des tribunaux administratifs ou menace de se produire à Montpellier toute sa saison, le roublard Jean-Claude Gaudin fait quant à lui appel à ses vieux amis, le président de l’association OM Jean-Pierre Foucault en tête, pour tenter de faire infléchir la décision des dirigeants du club.
Foucault fidèle à Gaudin plutôt qu’à l’OM
L’animateur de télévision, dont on se souvient qu’il avait fermement soutenu la candidature de Jack Kachkar en 2007, est donc monté au créneau. Jouant contre le club, ses dirigeants et surtout la propriétaire Margarita Louis-Dreyfus, l’ex-présentateur de Sacrée Soirée est allé jusqu’à menacer « d’interdire à l’OM l’utilisation du numéro d’affiliation de l’ASOM », rappelant que selon la convention « les matches de compétition officielle doivent avoir lieu obligatoirement au Stade Vélodrome, situé dans la commune de Marseille » et fixant un ultimatum au 30 juillet à midi. Cela revient à dire que l’OM doit aligner les millions à la mairie ou s’assoir sur sa participation aux compétitions nationales. Une menace adressée par lettre recommandée à Vincent Labrune. Révélée par La Provence, elle ne devrait pas améliorer la popularité de Jean-Pierre Foucault dans les rangs des fans olympiens. Ce courrier met de nouveau en avant la fracture qu’il peut y avoir entre cette association, dont on se demande quand même à quoi elle sert sinon à mettre des bâtons dans les roues des dirigeants, et les véritables responsables qui sont garants de l’équilibre budgétaire du club.
Gaudin s’en prend à Pérez
Jean-Claude Gaudin est quant à lui un spécialiste des joutes verbales publiques. Son maniement de la langue et des intonations ont eu raison de maints adversaires politiques. Aussi, distribuant les coups avec le tact et le culot qu’on lui connait, il omet évidemment de rappeler ses responsabilités dans les négociations avec AREMA (paroles recueillies par L’Equipe) : « l’OM s’excite aujourd’hui, via Monsieur Pérez, le directeur général. Je ne l’ai jamais vu ou, si je l’ai vu, je ne sais pas qui c’est. Les dirigeants se refusent à parler avec nous. Ils ont tort. Comme quand ils saisissent le tribunal administratif par voie de presse. Nous sommes surpris de la brutalité avec laquelle on nous répond non. Mon devoir est de respecter les indications de la chambre régionale des comptes. Mais je cherche le consensus plutôt que l’affrontement. » Ses propos ne convainquent toutefois pas tous les observateurs qui, à l’instar de Pierre Ménès qui a commenté les évènements sur son compte Twitter, ont bien compris les tenants et les aboutissants de cette affaire : « cette histoire de Vélodrome est grotesque. L’OM est trop important pour sa ville. C’est triste que Gaudin ne s’en rende toujours pas compte. »
Compte tenu de la violence des invectives, les prochains jours s’annoncent médiatiquement très agités. Néanmoins, l’idée que l’on puisse rénover un stade sans se soucier du coût puis multiplier son loyer par cinq ou six, le tout sans consulter au préalable le club locataire, est tellement ahurissante que cette polémique parait bien incongrue. Difficile de ne pas partager l’irritation de Margarita Louis-Dreyfus et, plutôt qu’une résolution au tribunal, on souhaite que Monsieur Gaudin abandonne son dédain et reconnaisse ses erreurs. Si l’on ne doute pas qu’une entente finira par être trouvée, on espère que Marcelo Bielsa et ses hommes ne seront pas perturbés par tout ce tintamarre et sauront continuer la préparation avec la même application.